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Georgette, première debout et seule aux champs

05/05/2013 Commentaires fermés sur Georgette, première debout et seule aux champs

La plupart des femmes rurales estiment leurs horaires de travail à plus de 14 heures par jour. « Invivable ! » disent-elles. Iwacu a suivi la journée de Georgette Nyabenda, 24 ans, de la colline Kanyami. Récit.

<doc7326|right>5h15 au domicile de Georgette Nyabenda, de la colline Kanyami à Ngozi. Cette mère de deux enfants s’est déjà réveillée. Énergique, elle balaie la cour intérieure au rythme du chant des oiseaux. En un quart de tour, Georgette en a terminé du ménage de la maison de deux pièces. Son mari, et leurs deux filles de 3 ans et de 6 mois dorment encore. Elle prend tous les soins de ne pas les réveiller. Soudain, la cadette sort à quatre pattes en pleurant. Il faut tout arrêter pour la bercer.

Une demi-heure plus tard, la cuisine et la vaisselle l’attendent. Georgette Nyabenda pressent déjà que la journée va être longue. Selon elle, la pluie est tombée la veille, ce qui permet aux agriculteurs de sortir les houes pour la seconde saison culturale. Elle s’empresse d’allumer le feu pour cuire quelques plats avant de se rendre aux champs. Le repas pour le déjeuner a été préparé la veille. Juste le temps d’indiquer à son mari où le trouver.
A 6h30 min, tout est presque en ordre. La houe sur les épaules, l’enfant sur le dos, le repas à la main, Georgette Nyabenda quitte son domicile. Quelque 30 minutes seront nécessaires pour arriver à destination.

A son arrivée aux champs, elle commence à labourer. Elle y a retrouvé Evelyne Uwineza, 22 ans, son ami d’enfance. Celle-ci est venue l’aider. Mme Nyabenda explique qu’elle fait recours à elle parce qu’elle n’a personne d’autre : « Mes enfants sont encore jeunes et je n’ai pas de proches dans les alentours. » Les enfants, placés dans un coin du champ, se divertissent. De temps à temps, la petite pleure. Sa maman est contrainte de la mettre sur son dos et de retourner la terre avec. Parfois, une petite pause de 5 à 10 min s’impose.

C’est au moment où le soleil atteint le zénith que Georgette Nyabenda et son amie pensent à déjeuner. Sous le soleil accablant, il n’y a ni arbre ni buisson pour s’abriter. Il faut tenir le coup.  « C’est notre peine quotidienne, lâche Georgette Nyabenda, avant de corriger, pain quotidien. » Trente minutes de repos, pour ensuite recommencer.

Aux alentours de 15h30, les enfants pleurent à tour de rôle. La maman a compris : « Elles sont fatiguées. C’est le signe qu’ils veulent rentrer. Ils n’en peuvent plus. » Vers 16 heures, elle décide d’arrêter pour reprendre le lendemain. Toutefois, Georgette Nyabenda doit encore passer dans un buisson pour chercher le bois. Ce n’est qu’à 20 heures qu’elle se reposera quelque peu avant de revivre la même histoire le lendemain.

D’après Mme Nyabenda, son mari a quitté le toit familial à 8 heures pour se rendre au marché de Ngozi où il exerce de petits boulots de commerçant. Il ne s’intéresse pas aux travaux des champs, « un rôle de femmes » dit-il. Il reviendra tard dans la nuit entre 20 et 21h. « Mes tracasseries de la journée, il ne veut rien en entendre. Pourvu qu’il trouve au quotidien 1500 Fbu de ration», se désole-t-elle. Elle poursuit que grâce à la vente de sa récolte parfois insuffisante, elle assure le reste des besoins familiaux comme les soins de santé des enfants, leurs vêtements, etc. Et de conclure que c’est la vie que la plupart des femmes rurales traînent derrière elles.

<doc7327|right>Quand certains hommes en prennent conscience …

Tous les hommes ne se comportent pas comme le mari de Georgette. Ainsi, Joseph Bandorukundi, 65 ans, originaire également de Kanyami, réfléchit autrement. Il est arrivé dans son champ à 7h30 en compagnie de son épouse Godelieve Manirakiza, 40 ans. Il estime que les temps où l’homme se croisait les bras sont révolus : « ce n’est plus le moment de rester assis au cabaret en attendant des bouteilles de bière dont on n’ignore la provenance. » Selon lui, l’homme et la femme doivent évoluer ensemble. « Le développement et l’épanouissement de la famille, c’est toute une vie à deux », concède M. Bandorukundi.

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