Lundi 29 avril 2024

Politique

Elections 2015 : la politique de l’Autruche

Réactions des politiques et la société civile

 

Léonce Ngendakumana : « C’est une réédition de la mascarade électorale de 2010. »

Léonce NgedakumanaPour le président du parti Sahwanya Frodebu et de l’Adc-Ikibiri, toutes les irrégularités et la tricherie observées démontrent que le fichier électoral a été préétabli longtemps à l’avance. Léonce Ngendakumana ne mâche pas ses mots : « Il ne faut pas se voiler la face, il n’y a pas d’enrôlement des électeurs. C’est une réédition de la mascarade électorale de 2010. »

M. Ngendakumana raconte que si le pays avait un gouvernement et une Ceni responsables, le peuple burundais leur exigerait un audit sur tout le processus d’enrôlement. Il rassure qu’il tomberait en annulation pour les multiples irrégularités et fraude observées.

Pour Léonce Ngendakumana, l’actuelle Ceni doit démissionner pour permettre à la nouvelle d’étudier de nouveaux mécanismes d’enrôlement. Il appelle tous ceux qui aspirent au changement de constituer une force capable de défier le gouvernement et ses démembrements dont la Ceni : « Nous n’arrêterons pas de dénoncer la prolongation de la tricherie. »
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Pierre Claver Mbonimpa : « Il faut recommencer l’enregistrement des électeurs »

PC MbonimpaLe président de l’Aprodh indique que son association a déjà saisi plusieurs cartes nationales d’identité. Il donne l’exemple des communes Kamenge, Musaga, Kinindo, Kanyosha rural et presque partout à l’intérieur du pays. « Nous avons même attrapé des gens en train de confectionner en cachette des fiches leur permettant d’avoir des cartes nationales d’identité », témoigne Pierre Claver Mbonimpa. Selon lui, les personnes attrapées possèdent des listes des membres du parti au pouvoir avec leurs numéros de téléphones. Ce qui étonne le président de l’Aprodh est qu’il a saisi presque le même nombre de cartes : «A Kayanza, spécialement dans les communes Kabarore et Gatara mais aussi à Ngozi dans la commune Busiga, nous avons pris deux cents cartes. » Si cela se fait dans toutes les communes, explique Mbonimpa, celui qui organise cette fraude aura gagné les élections à plus de 40% avant qu’elles ne commencent. « Cela ressort de nos calculs en nous basant sur les statistiques fournies pas la Ceni », précise-t-il.

Le président de l’Aprodh propose d’annuler l’enregistrement des électeurs. Par après, il espère que tous les partenaires vont analyser comment utiliser des cartes nationales bien identifiées. Au cas contraire, prévient Mbonimpa, on va partir sur de faux documents : « Cela va fausser les résultats et le Burundi aura de faux dirigeants. » Pierre Claver Mbonimpa fait savoir que certaines de ces cartes ont été remises aux Opj (Officier de police judiciaire) et d’autres seront données soit au procureur en mairie de Bujumbura, soit à d’autres personnes. Pour lui, l’essentiel est que l’opinion est déjà au courant de cette fraude.

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Charles Nditije : « L’enrôlement : une véritable honte pour la République »

Pour le camp Nditije, c’est une question qui regarde le Cndd-Fdd et le ministre de l’IntérieurUne Ceni qui n’est pas disponible à ses partenaires politiques, se demande Charles Nditije, pour qui travaille-t-elle ? Au nom de l’alliance constituée de six partis politiques et deux organisations politiques (annoncée officiellement ce jeudi, 11 décembre, ndlr), M. Nditije déclare qu’elle forme avec ses démembrements, une conglomération des tricheurs : « Nous ne pouvons pas cautionner une mascarade d’inscription avec tout le mépris et l’arrogance de la Ceni. »La Ceni, regrette-t-il, a failli à ses missions constitutionnelles de travailler en toute indépendance. Il ne doute pas que c’est un instrument du pouvoir.

L’opération d’enrôlement, insiste-t-il, doit s’arrêter pour mettre en place de nouvelles structures. Et de déclarer que la pression sur la Ceni ne fait que commencer : « Si la Ceni ne démissionne pas de son propre gré, nous allons lui annexer une Ceni parallèle qui rassure tous les citoyens burundais. » Et de solliciter l’organisation des Nations Unies pour la mise en place d’un mécanisme complet et intégré de monitoring électoral.
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Conseil des Evêques catholiques : « La Ceni doit être indépendante »

Dans un message adressé aux Burundais ce dimanche 7 décembre, le Conseil des Evêques catholiques du Burundi signale que l’enrôlement des électeurs a eu des irrégularités et ainsi suscité beaucoup de discussions. Au moment où les uns parlent des irrégularités visant à truquer les élections, d’autres évoquent de simples incohérences pouvant être corrigées, mentionne le même message.
Les responsables de l’Eglise catholique rappellent à la Ceni que son rôle est irremplaçable : « La commission doit tout faire pour prouver qu’elle est effectivement indépendante. Elle doit privilégier l’écoute et la conservation avec tout le monde ». D’après eux, dans son langage et son mode de faire, elle doit éviter tout ce qui est de nature à susciter des suspicions. Et ce, afin d’éviter que sa capacité d’arbitre ne soit pas acceptée de tous.

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« La Ceni semble recevoir les ordres d’ailleurs »

Pr. Paul Ngarambe indique que c’est regrettable que la Ceni ferme toutes les portes à ses partenaires alors qu’elle est supposée être un organe indépendant.

Paul Ngarambe : « La prolongation ne répond pas aux problèmes que posent les partenaires. »  ©Iwacu
Paul Ngarambe : « La prolongation ne répond pas aux problèmes que posent les partenaires. » ©Iwacu

Pour Paul Ngarambe, président de la Ceni de 2005, la plus grave irrégularité de ce processus d’enrôlement est la distribution de la carte d’identité simultanément. Selon lui, il ne faut pas frustrer les gens, il faut leur donner du temps pour se procurer la pièce d’identité puis s’enrôler. Le temps, ajoute-t-il, ne peut pas constituer un prétexte de la Ceni. Aux élections de 2005, témoigne-t-il, le référendum était prévu au mois de février 2005. La Ceni devrait avoir fini l’enregistrement des électeurs au mois de novembre 2004. En décembre, à deux mois du referendum, l’ancien président de la Ceni précise qu’elle avait rendu public la liste électorale pour vérifier s’il n’y a pas des doublons, voire des triplets : « Nous avons réussi. »

Or, Paul Ngarambe observe que nous avons cinq mois encore devant nous : « Pourquoi cette précipitation ? » Il regrette que la pièce d’identité soit octroyée de la façon la plus classique qui soit alors qu’il y avait un projet de la pièce d’identité biométrique : « Pourquoi le ministère de l’Intérieur a-t-il renoncé alors que c’est le seul moyen qui peut réduire la fraude électorale ? Le logiciel bloque.»

M. Ngarambe y voit un hic : « Je ne suis pas loin de penser que l’intention de frauder les élections réside là. » L’administration, réalise-t-il, doit être loyale, doit respecter les Burundais et les institutions du pays.

« Il faut repartir d’un autre pied »

Paul Ngarambe est sans équivoque : « La Ceni doit annuler l’enrôlement.» La prolongation, insiste-t-il, ne répond pas aux problèmes que la société civile, les partis politiques, les confessions religieuses, etc. posent. La Ceni, constate-t-il, ne s’est pas conduite comme un organe indépendant. Selon lui, le côté indépendant ne se fait pas voir et la Ceni ne semble pas s’ouvrir : « On dirait qu’elle reçoit les ordres d’ailleurs au lieu d’écouter ses partenaires. »

Il estime qu’il faut d’abord se mettre ensemble pour analyser l’ampleur des fraudes, les conséquences, etc. pour repartir d’un autre pied. Selon M. Ngarambe, il est toujours possible de bien faire.
Quant à la création d’une Ceni parallèle proclamée par les opposants, Pr. Ngarambe déconseille : « Nous sommes dans un pays qui a des lois où il est impossible de créer la cacophonie. » Un organe unique, précise-t-il, peut organiser les élections.

Pour lui, les partis et organisations politiques qui réclament la Ceni bis le font en désespoir de cause : « C’est parce qu’ils voient qu’ils n’ont pas accès à cette institution qui est là normalement pour eux. » C’est un cri d’appel pour demander à la Ceni le consensus. Normalement, conclut Paul Ngarambe, le gouvernement et la Ceni ne devraient pas faire la sourde oreille.
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Réactions de la Ceni : Une période de recours prévue par le code électoral

AutrucheSuite aux irrégularités dans l’octroi de la carte nationale d’identité, certains partis politiques et la société civile ont demandé la suspension de l’opération d’enrôlement. « Au regard de notre mandat et le temps qui nous sépare des échéances électorales de 2015, la Ceni n’a pas pu faire droit à cette demande », a déclaré Pierre Claver Ndayicariye, président de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni) lors d’une conférence de presse ce mercredi.

Il demande leur compréhension tout en promettant de travailler sur toutes les préoccupations exprimées au cours de l’opération d’enrôlement. Par ailleurs, en vertu de l’article 22 du code électoral, d’éventuels recours pourront être adressés au président de la Commission électorale communale indépendante (Ceci). M. Ndayicariye précise que l’étape d’affichage des résultats provisoires de l’enrôlement constitue une grande opportunité pour déceler d’éventuelles tricheries.

Néanmoins, reconnaît-il, « la décentralisation de l’octroi de la carte nationale d’identité (CNI) a généré un certain dysfonctionnement, suscitant ainsi des inquiétudes et un sentiment de malaise ». Conséquemment, Pierre Claver Ndayicariye signale que la Ceni a exhorté son personnel d’appui à la vigilance afin de ne pas enregistrer des personnes sur base des pièces falsifiées. Certaines anomalies relevées sont entre autres les cartes sans cachets de l’administration communale ou sans signature de l’administrateur, des CNI dont les photos ont été détachées, sans empreinte digitale, etc. Le président de la Ceni signale en outre que certains membres de son personnel sont dans
les mains de la justice pour avoir tenté par exemple d’enrôler une même personne deux fois.

Par rapport à la demande déposée ce mercredi par seize partis politiques et deux acteurs politiques exigeant l’annulation des résultats de l’opération d’enrôlement, Pierre Claver Ndayicariye leur promet une réponse prochainement. Pour lui, l’opération est en train de bien se dérouler et les irrégularités signalées ne sont pas de nature à invalider ses résultats. En effet, jusqu’au 9 décembre, 3.217.716 burundais se sont fait inscrire.

Forum des lecteurs d'Iwacu

8 réactions
  1. Vuvuzela

    Ubugeni bwabo bantu bozoba ryari, canke bwarabaye?

  2. giti

    Bien pensé. Avec ces manœuvres, alerte, aucun système de vérification automatisée/informatique du fichier n’est possible car il n y a pas de redondances. J espère qu ils ne vont pas nous parler de système informatique comme dans certains pays. Cet article me rappelle aussi que depuis deux ans déjà, la majorité des domestiques de certaines zones à Buja cachaient leurs cartes d identité et disent ne pas en avoir eu même à 40 ans. Mais quand on force le pas on se rend compte qu ils en avait ou avait changé de nom. J en ai attrapé au moins quatre. On pourrait pousser loin et se demander s’il n y aurait pas un lien entre ce phénomène et ce que l on viens de vivre lors de l ‘enrôlement.

  3. Nzobandora

    J’espère que ceux qui faisaient jusqu’ici le malin en disant qu’il n y a pas de preuves sont maintenant servis avec cette article.

  4. GACIYUBWENGE

    J’espère sincèrement qu’à chaque octroi de carte d’identité une signature est demandé et surtout, l’emprunte (igikumu comme c’était fait dans le temps.) . Là, alors, il faudra un logiciel au niveau national, qui servira à comparer les empruntes et trouver ceux qui se ressemblent. ainsi, les personnes inscrites deux ou plusieurs fois (ou à plusieurs identités sont simplement et sans difficultés démasquées.
    Le souci est qu’on ne veut pas investir dans ce domaine. en effet, de tel logiciels ne coutent pas trop chers; il suffit de le vouloir et d’exiger qu’à chaqu’obtention de la CNI, la personne laisse son emprunte dans les registres communaux et ces empruntes sont entrées dans les (ou l’) ordinateur(s) dopté(s) de ce logiciel. en quelques clic de secondes, les personnes ayant cherché deux ou plusieurs cartes d’identités sont démasquées.

  5. Nzobandora

    Ntawuhisha umwotsi inzu iriko irasha.Kandi ngo uwubundabunda abonwa n’uwuhagaze.
    De toute façon il ne fallait rien s’attendre de cette commission dirigée par des personnalités qui auraient difficilement pu imposer une grande intégrité morale et une imperturbable neutralité vue qu’ils jouissent maintenant d’un salaire confortable alors qu’ils étaient (surtout le Président) dans une situation économique difficile avant leur nomination.
    D’ailleurs il a même publiquement avoué qu’il servira sans faille son chef (au lieu de la nation) , celui qu’il avait nommé.
    Un autre CENI avec Ngarambe ferait l’affaire mais nos chers DD l’accepteraient très difficilement alors que paradoxalement c’est bien lui qui les avait déclarés vainqueur en 2005.

  6. DUBOIS

    En temps normal, la carte d’identité n’est pas obligatoire au Burundi ? On peut circuler sans carte d’identité ? Proposition : rendre la carte d’identité obligatoire dès l’âge de 14 ans puis qu’elle se demande tout le temps pas uniquement en période électorale. Mais c’est un petit paradis ce pays où la carte d’identité n’est pas obligatoire !!!!

  7. lecteur14

    Ce qui reste à faire c’est de convaincre ces gens qui ont plusieures cartes d’identité de ne pas voter pour les Cnnd-fdd. Les montrer que ce sont des tricheurs et qu’il ne font pas faire confiance auw tricheurs. Il faut bien faire une bonne campagne électorale

  8. MUKOZI

    Mukinda mugaramye muvuga yamuhe amatora azogenda neza cane

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