Utilisé surtout en période électorale, le langage polarisant conduit à la violence de masse s’il n’est pas dénoncé. A l’approche des élections de 2025, la population de la colline Birwa, commune Kanyosha, province de Bujumbura appelle les leaders politiques à la responsabilité.
Selon Jeanine Ndayizeye, une habitante de la colline Birwa, zone Ruyaga en commune Kanyosha, avant les élections, les gens sont sereins et calmes. Mais, lors des campagnes électorales, la tension monte. « Des natifs résidant à Bujumbura reviennent pour nous manipuler et nous opposer. Nous commençons alors à nous diviser. Des messages polarisants sont tenus selon les convictions politiques de chacun », précise-t-il.
M.K. fait la même lecture. Il fait en effet observer que lors des élections, des messages de haine sont tenus par des politiques et relayés par des militants dans la communauté. « Des mésententes entre les militants des différents partis naissent. Certains font comme s’il n’y avait pas de relations entre eux. Une polarisation s’installe ».
Pour une autre femme mère de trois enfants, les campagnes électorales sont une période propice à la manipulation. Des politiciens, dit-elle, tentent par tous les moyens de convaincre les gens tout en les divisant.
D’après M.P, sous l’effet de la manipulation politique en période électorale, chaque militant veut s’imposer en fonction de ses convictions politiques. « Certaines personnes tiennent des messages violents et provocateurs contre leurs adversaires qu’ils considèrent comme des ennemis », fait-il remarquer.
D’après un autre citoyen, les militants et les politiciens sont motivés par leurs intérêts électoralistes. Ils veulent, dit-il, accéder au pouvoir à tout prix. « Ils profèrent des insultes et d’autres mots blessants pour discréditer les autres », souligne-t-il.
Ces habitants de la colline Birwa font savoir que les conséquences de ce genre de messages sont néfastes. Il s’agit notamment des conflits qui naissent, de la haine entre les différents groupes, de la mise en cause de l’unité et de la cohésion sociale. Comme point culminant, le pays risque de sombrer dans la guerre comme par le passé.
Selon Prudence Baranyikwa, secrétaire exécutif permanant de la commune Kanyosha, à l’approche des élections, les membres des différents partis politiques entrent en désaccord. « Ils font la course derrière une ressource rare qu’est le pouvoir. Chacun espère gagner les élections. Les acteurs trouvent des slogans qui, parfois, blessent, dénigrent et diabolisent les adversaires », précise-t-il.
Il trouve que si ces messages sont pris au sérieux par leurs partisans, cela peut aboutir à des conflits dans la communauté. « La méfiance s’installe. C’est une sorte de polarisation qui peut même déboucher sur une crise sanglante. Il y a eu un moment où du sang des Burundais a été versé », fait-il observer.
Des projets de société adéquats
Cet administratif explique que tout cela est motivé par la soif et la boulimie du pouvoir. Certains veulent s’y maintenir par tous les moyens, fait-il remarquer tandis que d’autres veulent y accéder à tout prix. Il appelle plutôt à entretenir une culture de respect mutuel, d’unité et de cohésion sociale.
D’après Richard Nkunzimana, expert en droit de l’Homme et en résolution pacifique des conflits, la période électorale est propice aux messages de haine. « Des leaders politiques peuvent se lancer des mots violents et blessants. Des militants qui ont des convictions politiques différentes se lancent des invectives. Un groupe diabolise un autre pour l’écarter et gagner l’électorat ».
Cet expert rappelle la situation lors des échéances électorales de 1993. Deux principaux partis politiques, à savoir l’Uprona et le Frodebu étaient en compétition. « Les militants de l’Uprona qualifiaient le candidat Ndadaye de kinyamwanira (vautour) et ceux du Frodebu disaient que l’Uprona est un petit parti qu’ils ont déjà vaincu. Ils tenaient des messages de diabolisation mutuelle. Cela a conduit aux actes de violence », a-t-il fait remarquer.
Il pense que les auteurs de ces messages sont motivés par la poursuite des intérêts politiques, symboliques et économiques.
Richard Nkunzimana rappelle que la diabolisation des adversaires réveille les vieux démons et débouche sur les violences de masse. « Chaque situation de conflit et de violence naît souvent des violences verbales ».
Il conseille la population de rester sereine car, après les élections, la vie continue. Il invite les acteurs politiques à présenter plutôt des projets de société adéquats et efficaces au lieu de semer la zizanie.
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