Samedi 12 octobre 2024

Politique

Elections 2025/2027 : Le réveil des partis de l’opposition ?

Elections 2025/2027 : Le réveil des partis de l’opposition ?
Olivier Nkurunziza et Tatien Sibomana lors de la journée de réunification de leurs camps.

D’aucuns se demandent si ce n’est pas une énième réunification du parti du Prince Louis Rwagasore. L’Uprona de « Kumugumya » – dit institutionnel – et le camp de Tatien Sibomana se sont réunis ce samedi 25 mai 2024. Parallèlement, le parti Sahwanya-Frodebu appelle ses militants à se rassembler afin de constituer une force incontournable lors des élections de 2025 et 2027.

Par Fabrice Manirakiza et Pascal Ntakirutimana

Des sourires sur toutes les lèvres, des embrassades, l’ambiance était à la fête ce samedi 25 mai 2024, à Kumugumya. Après une décennie de brouilles, l’Uprona institutionnel et le camp de Tatien Sibomana se sont réunifiés sous les applaudissements des Badasigana, militants du parti du héros de l’indépendance, le Prince Louis Rwagasore. Peut-être les prochaines élections y sont pour quelque chose. Pour les deux partis, c’est l’aboutissement de plusieurs rencontres qui ont duré de longs mois.

Le 3 mai 2023, après près de 15 mois de négociations, l’Uprona de Kumugumya, dirigé par Olivier Nkurunziza, avait annoncé son alliance avec une partie de l’Uprona de l’opposition. Cette dernière était constituée par Evariste Ngayimpenda, l’ancien premier vice-président Yves Sahinguvu et Bonaventure Gasutwa.

D’après Evariste Ngayimpenda, les militants étaient fatigués de ces divergences. « Nous avons tenté un rapprochement en 2019, mais ça n’a pas marché. Nous avons de nouveau essayé en 2021 et les militants avaient manifesté de l’enthousiasme, mais nos divergences idéologiques ont empêché le projet d’aboutir. » M. Ngayimpenda a indiqué qu’après l’échec de 2021, ils ont pu dégager un consensus : « Ce conflit plaçait nos deux directions en rupture avec nos bases. » Selon lui, ces conflits à la tête de l’Uprona ont affaibli le parti sur la scène politique. « Avec cette rupture, le poids de l’Uprona n’a cessé de s’effondrer, et c’est particulièrement perceptible à l’Assemblée nationale. Plus cette rupture durait, plus les prétentions des uns et des autres devenaient caduques. »

Olivier Nkurunziza, président du parti Uprona, a annoncé qu’ils ont mis leurs divergences de côté pour mettre en avant l’intérêt supérieur du pays et de la nation. « Cette ouverture permet aussi le recrutement massif de nouveaux membres. Tout le monde est vraiment le bienvenu. Les portes sont ouvertes. » À cette époque, Tatien Sibomana se disait ouvert à ce projet de réunification, mais il restait réticent à rejoindre le processus. « Il faut qu’on s’entende sur les modalités de cette réunification. Il y a pas mal de points qui nous séparent. » Et de citer notamment « la disparition » de l’Accord d’Arusha, qu’il attribuait à l’Uprona de « Kumugumya », qui a soutenu la révision de la Constitution de 2018, l’absence de critiques de l’Uprona contre le travail « de contre-vérité » mené par la CVR, l’abandon des déplacés internes et les conséquences désastreuses de la crise de 2015. « Nous ne sommes pas prêts à céder sur notre vision sur tous ces sujets au profit de celle de Kumugumya. Mais nous poursuivons les discussions avec l’Uprona institutionnel et le jour où elles aboutiront, nous vous en tiendrons informés. »

Les sages tempèrent les ardeurs

Émile Mworoha, un sage du parti Uprona, se réjouit de la réunification des deux ailes non pas parce que c’est son parti, mais parce que la division n’a jamais conduit au succès. Cet historien, ancien ministre de la Jeunesse, des Sports et de la Culture, indique que ce processus de réunification a pris beaucoup de temps. « Je ne m’attribue aucun rôle dans ce processus, mais nous avions constitué un groupe de réflexion pour faire appel à cette réunification et à la réorganisation du parti. Curieusement, il y a eu une sorte de réveil au sein du parti, les différents courants se sont concertés et ont décidé de réconcilier le parti Uprona à la veille des élections. » Il appelle d’autres partis à s’entendre sur des programmes et projets pour faire rêver les Burundais. Selon lui, l’Uprona est un parti de la décolonisation et de l’indépendance du Burundi. « Grâce à l’Uprona, le Burundi a non seulement acquis son indépendance, mais il a également bénéficié d’une aura internationale. » L’Uprona a, selon le professeur Mworoha, longtemps servi au développement du pays.

Toutefois, les décennies au pouvoir n’ont pas permis au parti Uprona de résister aux crises. « Il y a eu des divisions internes : l’aile de Charles Mukasi et celle de Kumugumya, etc. D’ailleurs, les divisions ont presque touché tous les partis politiques, comme le Frodebu, qui était un parti très important de la démocratisation, mais où des divisions persistent encore. » Pour lui, ces phénomènes singuliers et difficiles qui ont abouti à des divisions dans la plupart des partis politiques ont eu des conséquences sur la vie économique, politique et sur la gouvernance nationale. C’est pour cette raison qu’il fallait réunir ces courants qui s’étaient développés au sein de l’Uprona.

« Est-ce encore une réunification de plus ? »

« Je les félicite d’abord pour cette réunification, mais est-ce que ce n’est pas encore une réunification de plus ? », s’interroge Gaston Sindimwo, député de l’Uprona. Cet ancien Premier vice-président de la République rappelle qu’à la veille des élections de 2020, une initiative similaire a eu lieu, mais elle a été étouffée par le président du parti de l’époque. « Si le président actuel de l’Uprona juge nécessaire de se mettre ensemble, pour moi, c’est une bonne chose. »

Va-t-il adhérer à ce projet de réunification ? Gaston Sindimwo fait savoir que c’est aux dirigeants actuels de l’Uprona de faire le premier pas vers les gens. « Pour rappel, j’ai intenté une action en justice contre ce parti. Je n’ai pas encore eu ce contact. » M. Sindimwo rappelle qu’il y a toujours eu des cassures au sein de l’Uprona. « La première a eu lieu en 1965. Celle qui a été très remarquée a eu lieu le 7 octobre 1998. Nous avons alors eu deux ailes : l’une de l’Uprona institutionnel et l’autre de Charles Mukasi. C’est à partir de là que nous avons connu la vraie séparation du parti Uprona. En 2009, nous avons tout fait pour réunifier les Badasigana. Tout le monde croyait que ça tiendrait, mais il y eut une autre cassure en 2011. À cette époque, il y a eu un courant dit de réhabilitation. En 2020, nous avons tenté une autre réunification, à notre initiative, afin de préparer les élections. Malheureusement, le président du parti n’a pas accepté ce principe. »

Selon Gaston Sindimwo, l’Uprona a évolué à reculons parce qu’on écarte les nouveaux membres. « Il faut que le parti Uprona soit inclusif. Nous espérons que le parti de l’indépendance va se relever avec peut-être ces nouveaux venus. » Toutefois, Gaston Sindimwo se demande si cela va prendre racine. « Wait and see ! »

 

 

Quid du Sahwanya-Frodebu et du CNL ?

A la veille des élections de 2025-2027, la volonté de recomposition politique semble se poursuivre au sein des autres formations politiques. C’est le cas du parti FRODEBU qui a déjà lancé son programme de réintégration de tous les membres.C’est ce qui ressort du communiqué sorti à l’issue de la réunion extraordinaire du Conseil des délégués nationaux (CDN) tenue le 18 mai 2024.« Vu les circonstances actuelles où le Burundi est au prisme d’une crise multiforme : politique, économique et sociale et bien d’autres raisons ; conformément à l’objectif du Congrès national, la présidence du parti est en train de se battre bec et ongles pour redynamiser le parti. », peut-on lire dans ledit communiqué signé Patrick Nkurunziza.Cette note précise en outre que pour que le parti Sahwanya FRODEBU puisse contribuer à la résolution de cette crise multiforme, il est nécessaire de rassembler tous les Inziraguhemuka, membres de ce parti, pris comme des brebis égarées pour de multiples raisons.Sur ce, poursuit le communiqué, le CDN informe aux Inziraguhemuka, à l’opinion nationale et internationale qu’il a adopté un programme de réunifier et réconcilier tous les Inziraguhemuka. « Le CDN annonce la suppression de toutes les sanctions qui avaient été infligées aux membres du parti qui se sont mal comportés. »   Le Sahwanya-Frodebu s’engage d’ailleurs à accueillir de nouveaux membres via ses organes, de la base au sommet.

Pour Phénias Nigaba, vice-président et porte-parole du parti Sahwanya-Frodebu, le projet de réunification date de longtemps. « Il y a eu une désunion pour diverses raisons. D’ailleurs, certaines personnes qui sont dans le parti au pouvoir étaient nos militants. Lorsque le Cndd-Fdd est arrivé, il y a 30 députés qui sont partis. Nous entendons des grognes un peu partout, car certains ne sont pas heureux là où ils sont. Ils veulent retourner au bercail. Nous avons pris la décision de rassembler tous nos militants qui veulent qu’on mène le combat ensemble. »

Selon le porte-parole du parti Sahwanya Frodebu, l’objectif principal de ce projet de réunification est de participer aux élections avec une force considérable. « Nous avons trois visées. La première est de respecter les décisions issues de la réunion extraordinaire du CDN en rassemblant tous les militants. La deuxième est de rendre le parti plus fort. La dernière est de se préparer aux prochaines élections. »

M. Nigaba ne doute pas que le parti de Melchior Ndadaye pourra avoir un bon score aux prochaines élections.

« Nous constatons que les Burundais ont soif du changement. Y compris même les gens du système. C’est ce qui s’est passé en 1993. »

Quant au CNL, Nestor Girukwishaka, son président, indique que depuis la tenue du congrès du 10 mars 2024 à Ngozi, cette formation s’est engagée dans le processus de réconciliation. « Autrement dit, toute personne est la bienvenue sans aucune restriction. Les Inyankamugayo, c’est-à-dire les militants du CNL sont unis et personne n’a été chassé du parti, y compris même l’honorable Agathon Rwasa. » Et d’ajouter : « Malgré la crise interne que nous avons connue et qui nous a pris beaucoup de temps, le parti CNL reste le principal parti d’opposition au Burundi. A l’heure qu’il est, nous sommes à pied d’œuvre pour nous préparer sérieusement aux élections de 2024. »


Rencontre avec Tatien Sibomana

« Il faut redonner à l’Uprona son image. »

Raisons de retour au parti Uprona de Kumugumya, apport de son camp pour consolider le parti, perspectives électorales…Tatien Sibomana s’est confié à Iwacu après les cérémonies de réunification tenues le Samedi 25 mai 2024. Interview.

Dans vos interventions médiatiques, vous disiez que le parti Uprona « de Kumugumya » fait face à un manque criant d’un leadership réconciliateur. Votre retour au parti prouve le contraire ?

Oui, je l’ai dit et je maintiens toujours ma position. Mais seulement, quand je le disais, on n’avait pas encore commencé les contacts avec le président de l’aile dite de Kumugumya (siège du parti Uprona), entendez par-là monsieur Olivier Nkurunziza. Mais au fil du temps, on s’est entretenu, d’abord de façon informelle à deux et à plusieurs reprises. Puis, de façon formelle, c’est-à-dire sa direction et la mienne. Je me suis rendu compte finalement qu’il a  des qualités qu’il a plus que ces prédécesseurs.

Par exemple ?

Les autres ne voulaient pas qu’il y ait une réconciliation du parti. Et cela pour des calculs purement personnels ou pour des calculs des parrains qui ne veulent pas se révéler au grand jour, mais que tout le monde soupçonne. Avec Olivier, on est parvenu à nous entendre sur le gros de ce qui divisait les Badasigana. C’est notamment la problématique du leadership qui n’était pas la seule. Parce que je l’ai toujours dit, l’Uprona a une vision ; qu’il doit défendre bec et ongles.

Il y a des problèmes qui hantent le pays en général et les Badasigana en particulier qui peuvent être ponctuels, et même structurels. Et l’Uprona doit avoir des positions claires sur toutes ces questions. Ces positions doivent être portées à la connaissance des Burundais et en cas de besoin à la communauté internationale.

Vous n’allez pas très loin dans vos accusations contre ceux qui ont dirigé le parti avant Olivier Nkurunziza ?

Ils avaient carrément décidé de violer impunément la vision de l’Uprona. Ils avaient opté pour le silence complice du parti Uprona par rapport aux questions de l’heure.

Par ailleurs, j’ai trouvé en Olivier Nkurunziza une personne qui peut avoir une bonne volonté si bien sûr, il est entouré par d’ autres responsables décidés à sauvegarder l’indépendance de l’Uprona comme parti et sa vision.

Qu’est-ce que vous allez faire concrètement avec lui ?

Travailler ensemble pour  améliorer ce leadership qui manquait et pourquoi pas penser à un nouveau leadership carrément. Et tout cela a été débattu et conclu. Enfin, un document qui fait l’état de toutes les positions de l’Uprona sur toute ces questions et auquel tout responsable du parti, du sommet à la base est tenu de s’y référer dans toutes ses interventions va être élaboré. C’est donc un changement de fond.

Mais vous accusiez l’Uprona de « Kumugumya » d’être dans le giron du parti au pouvoir. Espérez-vous un changement ?

Je vous ai déjà dit que parmi les questions qui nous divisaient, le fait de ne pas avoir des positions claires de l’Uprona est une des questions de fond. Comme je viens de le dire , on s’est convenu de revenir sur toutes les questions qui peuvent diviser les Badasigana, faire une analyse et une lecture commune et faire des propositions communes quitte à ce que ce document soit comme une bible pour la direction de l’Uprona et tous les Badasigana.

En mettant ensemble toutes ces questions analysées et en ayant apporté des réponses propres à l’Uprona, je suis convaincu qu’on ne va plus avoir les mêmes positions que le parti au pouvoir. Je le dis sans ambages. Pour vous dire que les positions de l’Uprona seront les positions de l’Uprona. Et on va les assumer comme telles. Si par chance, sur telle ou telle autre question, on trouve que le parti au pouvoir adopte une position qui peut ressembler à la nôtre, là ça va. Mais, si par malheur l’Uprona trouve que l’analyse faite par rapport à telle ou telle question ou la voie de solutions proposées par le parti au pouvoir ne rencontrent pas notre assentiment, cela ne va pas nous empêcher de sortir la position de l’Uprona.

Quel changement profond espérez-vous ?

Le parti Uprona va désormais être indépendant. Il y a d’ailleurs un autre aspect de cette indépendance sur lequel les gens se trompent. Un parti au pouvoir, qui d’une façon ou d’une autre a besoin d’un partenariat, il ne le cherche pas chez quelqu’un qui n’a pas d’assise. Même si vous pouvez négocier un partenariat, il faut avant tout avoir votre personnalité, vos positions, vos membres, une place qui vous permet de négocier un partenariat fort. Et non une alliance sans contrepartie. Voilà la logique que nous avons apportée dans l’esprit de cette réunification.

Une certaine opinion vous définissait comme un « électron libre » lorsqu’il s’agissait de donner des interventions médiatiques. Avec votre retour au parti Uprona reconnu par le pouvoir, allez-vous à cette liberté de parole qui vous caractérise ?

D’abord, je suis au regret de dire que je n’ai jamais été « un électron libre ». Moi, Tatien Sibomana, depuis l’université, je ne me suis jamais exprimé sans être un représentant d’un groupe ou d’une organisation quelconque. Je me suis toujours exprimé au nom des Badasigana qui se disent de l’opposition. Et maintenant, vous me posez la question si je vais continuer ? Aujourd’hui plus qu’hier. Vous croyez que les Upronistes de Kumugumya ne sont pas d’accord avec moi par rapport à mes positions ? Loin de là. Seulement, il y a des gens qui ne comprennent jamais qu’on peut travailler dans l’opposition. Ce n’est que ça.

Sinon, le discours qui est le nôtre, c’est le véritable discours de l’Uprona. Et ceux qui étaient à Kumugumya samedi l’ont compris.  De toutes les façons, les applaudissements reçus samedi, après mon intervention ne sont pas venus nécessairement de ceux  avec qui on était ensemble. Ceux de Kumugumya semblaient extérioriser une sorte de libération.

Certaines indiscrétions au sein de la même opinion disent que votre retour à l’Uprona de Kumugumya, à la veille des élections est un effet contextuel et ne constitue que, in fine, votre point de rechute. Votre commentaire ? 

Ils se trompent très fort. Je ne cherche pas un point de rechute. Je tombe d’où ? En 2009, quand on a initié le premier processus de réunification, j’étais parmi les tenants de cette position. J’étais le responsable du processus. Malheureusement et comme le disait Rwagasore, sans leadership valable, tout peut arriver. C’est ce qui nous est arrivé avec Bonaventure Niyoyankana. Sinon, j’ai toujours milité pour ça.

J’étais relativement jeune par rapport aux gens qui étaient autour de Charles Mukasi. Mais j’ai pu rallier tout ce monde-là et ils m’ont suivi sauf quelques-uns.

J’ai par après porté plainte au nom du courant de réhabilitation. J’étais parmi ceux-là qui avaient saisi la chambre administrative de la cour suprême pour la majorité des Badasagina qui avaient été exclus des organes parce qu’ils avaient décrié la mauvaise gouvernance du parti. Et j’ai eu un gain de cause. J’étais avec Jean Baptiste Manwangari, nous avons gagné le procès qui, malheureusement n’a jamais été exécuté pour des intérêts politiciens du parti au pouvoir avec cette aile de Kumugumya qui ne cachait pas de servir, même aveuglement le parti au pouvoir.

Aujourd’hui, c’est la énième tentative. Il y en a eu celles qui n’ont jamais été portées à la connaissance de l’opinion. Il y a eu des tentatives initiées par quelques sages du parti : Emile Mworoha, Mathias Sinamenye, Jumaïne Hussein, Gérard Nibigira. Même Nditije qui a été élu comme Gaston  Sindimwo a été d’accord à un certain moment. Mais l’affaire a échoué.

C’est pour vous dire que je ne cherche rien que l’intérêt du pays et celui des Badasigana. Si par hasard, on me demande de servir dans une position ou une autre, mais ce sera à une seule condition : ‘’que je vais servir ‘’. Non pas à être un suiveur ou un serviteur d’un système qui milite pour le contraire de nos intérêts, je peux le faire. Sinon, pourquoi j’aurais refusé de siéger à l’Assemblée nationale au cours de la législature 2015-2020 ? Parce que la position de l’Uprona n’était pas d’aller siéger.

Mais, les calculateurs, je les vois même aujourd’hui. Qui n’étaient pas même sur la liste, mais qui ont accepté d’occuper des positions de ceux qui avaient été élus ou qui avaient accepté de suivre les consignes du parti.

Concrètement, quelles sont les principales raisons qui vous ont poussé à rejoindre l’aile d’Olivier Nkurunziza ?

La première grande raison, c’est l’intérêt des Badasigana, qui directement ou indirectement, est lié à l’intérêt supérieur du peuple burundais. Je reste convaincu que si l’Uprona était fort, on ne saurait pas là où nous sommes. Le rôle de l’Uprona sur l’échiquier national est tellement primordial qu’il faut le renforcer pour l’intérêt de tout un peuple. C’est la première raison : l’amour du parti et en définitive celle de la patrie.

La deuxième raison, c’est qu’après autant d’années de séparation, toujours pour atteindre l’objectif premier que je viens de définir, on s’est dit ni les uns ni les autres n’y parviendront jamais tant que nous serons toujours dispersés. C’est aussi une autre raison qui nous a poussés de faire une analyse introspective.

La troisième raison, c’est qu’on s’est entendu avec l’aile de Kumugumya, spécialement la direction. Ce n’est pas tout le monde.  Olivier Nkurunziza lui-même sait que tout le monde n’est pas d’accord avec lui. Moi encore davantage. Mais encore une fois, c’est ça le rôle d’un leader. Nous sommes sûrs que ceux qui sont pour la réunification sont de loin plus nombreux que ceux qui combattent ce processus. Nous devons par-là prendre le taureau par les cornes et marcher avec ceux qui raisonnent de façon positive.

La troisième raison, c’est qu’effectivement le pays va très mal. Et si le pays va très mal, parmi les solutions à envisager, est de renforcer les partis politiques de l’opposition pour tendre vers une alternative. Parce que si on pose la question à quelqu’un s’il y a une force alternative envisageable face au parti au pouvoir. Probablement, qu’il lui sera difficile de répondre par l’affirmative. C’est aussi une raison qui n’est pas nécessairement à portée de tout le monde. Comme nous sommes arrivés à ce stade, cela est une des raisons qui nous ont poussés à nous réunifier.

Qu’entendez-vous faire pour redonner à l’Uprona son image d’antan ?

Je peux résumer notre plan en trois points principaux :

Un.Rendre l’Uprona indépendant : Nous souhaitons rendre l’Uprona totalement indépendant des autres partis politiques, y compris du parti au pouvoir. Ce principe sacro-saint est essentiel pour le bon fonctionnement du parti. Même si l’Uprona n’est pas au pouvoir, cela ne doit pas nous empêcher de promouvoir nos idées et nos valeurs.

Deux.Rétablir la vision et les valeurs de l’Uprona : Nous allons travailler pour que l’Uprona retrouve sa vision et ses valeurs fondamentales. Depuis des années, beaucoup se demandent quelle est la position de l’Uprona sur les questions qui préoccupent les Burundais. L’aile de Kumugumya n’a pas de position claire et se contente souvent de commentaires basés sur la ligne du parti au pouvoir. Un parti politique sérieux doit vendre ses propres positions pour être désiré par l’électorat ou regretté lorsqu’il n’est pas au pouvoir. Nous voulons faire de l’Uprona un parti désiré et regretté par les Burundais.

Enfin, créer un leadership valable : Nous allons doter l’Uprona d’un leadership capable de faire face aux enjeux actuels. Nous avons décidé que jusqu’aux élections législatives de 2025, les décisions ne seront plus prises unilatéralement. Après ces élections, nous organiserons un congrès formel où tous pourront se présenter. Cela permettra aux militants de choisir les meilleurs candidats parmi leurs pairs, assurant ainsi un leadership fort et compétent pour le parti.

Quid  perspectives électorales ?

Bien entendu, tout parti politique aspire à accéder au pouvoir, et l’Uprona ne fait pas exception, surtout après avoir dirigé le pays pendant plus de trente ans. Le parti souhaite revenir au pouvoir pour faire mieux que ceux qui nous gouvernent actuellement. Pour atteindre cet objectif, il est essentiel de mettre en œuvre les stratégies mentionnées précédemment : poser des actes concrètes, adopter des gestions rigoureuses et prononcer des discours rassurants et séduisants pour attirer un plus grand électorat.

Nous devons également mettre en avant les Badasigana de valeur et de notoriété, en insistant sur la désignation de candidats de l’Uprona capables de se démarquer par rapport aux listes des autres partis. Notre intérêt et notre stratégie consistent à valoriser les meilleurs membres du parti, plutôt que de nous contenter d’un militantisme aveugle et non avisé. En résumé, il s’agit de sélectionner et de promouvoir des candidats compétents qui pourront véritablement faire la différence lors des prochaines élections.

 

Tatien Sibimana donne quatre clefs pour comprendre le rapprochement avec Olivier Nkurunziza

Résumé des motivations pour rejoindre l’aile d’Olivier Nkurunziza

Intérêt des Badasigana et du peuple burundais : La principale raison est l’intérêt des militants de l’Uprona, les Badasigana, qui est lié à l’intérêt supérieur du peuple burundais. L’auteur est convaincu qu’une UPRONA forte est essentielle pour le bien-être du pays. C’est avant tout l’amour du parti et de la patrie qui motive cette décision.

Unité pour l’efficacité : Après des années de séparation, il est apparu évident que l’UPRONA ne pourrait atteindre ses objectifs tant qu’il resterait divisé. Une introspection a révélé que l’unité était nécessaire pour renforcer le parti.

Accord avec la direction de Kumugumya : Il y a eu un consensus avec la direction de Kumugumya, même si ce ne fut pas le cas pour tous les membres. Olivier Nkurunziza et Tatien Sibomana  ont reconnu que les adeptes de la réunification étaient plus nombreux que ses opposants. Ils ont donc décidé de saisir cette opportunité pour avancer avec ceux qui partagent cette vision positive.

Situation critique du pays : Le pays traverse une crise profonde et une des solutions pour y remédier est de renforcer les partis d’opposition pour construire une alternative crédible au parti au pouvoir. Cela contribue également à la décision de se réunifier pour former une force politique cohérente et efficace.

Forum des lecteurs d'Iwacu

4 réactions
  1. Dieudonné

    Mr rêve-rien attend que tous soient unis dans le Sein N dédain – F des dés.
    Je pense que ce serait une bonne idée parce que peut-être qu’il y aurait moins de morts de militants.

  2. Gacece

    Si on comprend bien, il y a le professeur Nimubona qui parle de divisions au sein du CNDD-FDD et cet article qui parle de partis d’opposition « unis », même les irréconciliables.

    Hmm… On voit venir le schéma!

  3. Nshimirimana

    Réconciliez-vous et donnez à notre supposée démocratie des alternatives! Mais, il y a un mais…
    Dans un contexte où seul l’Etat est quasi le seul employeur, le Parti au pouvoir n’est ni moins ni plus qu’un Ministère: celui de l’emploi ( ou de la fonction publique si vous voulez)…
    Comment vaincre les velléités sécessionnistes quand celles-ci sont téléguidés par l’employeur ( vous aurez compris de qui je parle)? Après tout, des bijoux lancés en l’air, chacun se précipite pour récupérer les siens!
    Je rigole quand j’entends Phenias nous dire que « certaines personnes qui sont dans le parti au pouvoir étaient nos militants » comme si certaines personnes du Frodebu n’étaient pas de l’Uprona! Les temps sont révolus, l’on ne se réconcilie pas autour « d’umuribate ». Les éleveurs comprennent

    • hakizimana jean capistran

      Tout est dit et tres bien dit pour ceux qui veulent comprendre. Une realite que l’on vit la mort dans l’ame!

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