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Politique

Sommet EAC : Le dialogue burundais relégué aux faits divers

08/02/2019 Commentaires fermés sur Sommet EAC : Le dialogue burundais relégué aux faits divers
Sommet EAC : Le dialogue burundais  relégué aux faits divers
Les chefs d’Etat de l’EAC décident de remettre à plus tard la question du dialogue burundais.

Mkapa qui annonce la fin d’une facilitation en panne, les chefs d’Etat de l’EAC qui décident que la question du dialogue va être étudiée plus tard, etc. Un sommet qui a ignoré la crise burundaise.

Ils ont renvoyé la question du dialogue inter-burundais aux calendes grecques. Le 21 ème point sur les 22 que constituent les conclusions du sommet des chefs d’Etat de l’EAC est très laconique. En gros, ils accusent réception du « rapport de Mkapa », le remercient pour son travail de facilitateur et concluent : « Nous parlerons du dialogue burundais plus tard. »

« Une victoire », a pourtant jubilé Gaston Sindimwo, le premier vice-président de la République qui a représenté le Burundi à ce sommet. Depuis la guerre épistolaire entre le médiateur dans le conflit inter-burundais, le président Museveni et son homologue burundais, certains s’attendaient à des étincelles lors du sommet. Le patron sortant de l’EAC avait exprimé son ras-le-bol au président Nkurunziza. L’EAC a des responsabilités dans la réglementation de la crise que traverse le Burundi depuis 2015 et entend bien les prendre au sérieux. Selon l’EAC, plus question de se laisser dicter sa conduite sur la façon de gérer la crise par une partie au conflit.

Finalement, la fermeté attendue au sommet n’a pas été au rendez-vous. Une déception pour l’opposition qui croisait les doigts et parlait même de ‘’sommet de la dernière chance’’. Certains de ses leaders en exil avaient encouragé Museveni à maintenir cette fermeté affichée dans sa correspondance à Nkurunziza. Ils étaient même allés plus loin, en demandant des sanctions contre le pouvoir en place. Au final « Rien de surprenant, » indique Charles Nditije, l’un des opposants en exil à l’origine de la correspondance adressée au président ougandais. Selon lui, ces chefs d’Etat de l’EAC n’ont jamais affiché la ferme volonté d’imposer à Bujumbura la voie du dialogue. « Bien au contraire, ils l’ont même encouragé directement ou indirectement par leur complicité ou leur manque d’engagement à aider le Burundi à sortir de la grave crise. Ils ont laissé faire, » a déploré Nditije. Du côté de l’opposition interne, le vice-président du parti Sahwanya Frodebu parle d’un échec des Burundais eux-mêmes. « Les chefs d’Etat de l’EAC n’avaient plus d’autres choix que de reléguer la question de la crise burundaise au rang des faits divers, » a annoncé Léonce Ngendakumana. Le leader de la coalition Amizero y’Abarundi, Agathon Rwasa quant à lui demande à l’EAC d’assumer la responsabilité de son échec.

Mkapa jette l’éponge

L’ancien président Mkapa a annoncé que sa facilitation arrivait à son terme. « Nous souhaitons bonne chance aux Barundi pour la suite, » a déclaré sur Twitter son assistant, Macocha Tembele.

Au total, 5 sessions en 3 ans dans lesquelles les protagonistes ne se sont jamais réunis en plénière pour amorcer une véritable discussion. L’ancien président tanzanien est allé de consultation en consultation, à coup de boycott et de claquement de porte des parties prenantes. Benjamin Mkapa avouera vers la fin être « fatigué par les exigences de Bujumbura. » Un dialogue qui en réalité n’a jamais commencé et qui finit en queue de poisson.

La sous-région a néanmoins décidé de garder la main. Pas question de suivre Mkapa et d’admettre sa défaite. Se faisant, elle exclut l’intervention de l’Union africaine qui l’avait mis sur le coup. Le premier vice-président de la République, Gaston Sindimwo a révélé qu’il a été convenu que les présidents ougandais et tanzanien entrent en contact avec le président Nkurunziza pour établir « la suite à apporter au dialogue ».

A ce stade, difficile à dire quand elle reprendra. Avec une facilitation organisatrice qui a déclaré ne plus être de la partie et un sommet qui n’a fixé aucun calendrier, repoussant cette décision à plus tard.

A l’évidence, c’est un temps précieux gagné par Bujumbura. Les élections de 2020 approchent à grands pas et le pouvoir en place s’active. La Constitution a été révisée, la feuille de route de Kayanza adoptée et le code électoral analysé. Il n’en faut pas plus au pouvoir en place de continuer sur sa lancée.


Le contentieux burundo-rwandais, même pas évoqué

Les chefs d’Etats du Rwanda et du Burundi ont du mal à normaliser les relations entre les deux pays.

La promesse non tenue sur le conflit qui mine les relations entre les deux pays de la Communauté Est Africaine. Le président sortant de l’EAC avait pourtant promis à son homologue burundais que cette affaire sera évoquée au cours du sommet, « pour le bien de la région. » Au final, ce conflit a été ignoré, au grand dam du gouvernement burundais.

Le chef de l’Etat avait pourtant qualifié le Rwanda d’ennemi du Burundi. Il l’avait accusé d’être derrière le putsch manqué de 2015 et de recruter dans le camp de Mahama des Burundais et leur octroyer une formation paramilitaire dans le but de déstabiliser le Burundi. Des accusations rejetées par le Rwanda qui semble ne pas vouloir débattre de la question.

Très prolifique sur tweeter, l’ambassadeur rwandais, Olivier Nduhungirehe a rejeté l’idée d’un sommet extraordinaire sur le sujet. « Un sommet extraordinaire sur le conflit Burundi contre Rwanda …sans le Rwanda ? », a-t-il lâché.

En tout cas, il faut être deux pour danser le tango. Et visiblement, cette possibilité est loin de plaire aux deux…partenaires. « Le Burundi peut patienter car nos deux pays survivront à nos dirigeants. Ce sommet spécial aura lieu un jour, avec ou sans vous,» a répondu le porte-parole du président burundais, Jean Claude Karerwa.

EAC

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