Jeudi 18 avril 2024

Politique

Ruhororo : la réconciliation déjà enclenchée

22/02/2015 5

Mariages interethniques, entraide dans les travaux champêtres ou dans la construction… sont déjà une réalité entre les déplacés et les résidents. Un atout pour la CVR.

 A Ruhororo, les déplacés sont encore réticents à regagner leurs ménages, malgré les efforts de rapprochement ©Iwacu
A Ruhororo, les déplacés sont encore réticents à regagner leurs ménages, malgré les efforts de rapprochement ©Iwacu

En commune Ruhororo, province Ngozi, plus d’une vingtaine d’années après 1993, certains déplacés ont déjà regagné leurs ménages. Un des signes de rapprochement entre déplacés, majoritairement Tutsi, et ceux qui sont restés sur les collines, essentiellement Hutu. C’est le cas d’Egide Barutwanayo, de la colline Gitaramo, rentré il y a quatre mois. C’est une réponse au programme gouvernemental de rapatriement de ceux qui avaient fui leur ménage. Il a bénéficié de l’appui de l’Etat dans la construction d’une nouvelle maison et des encouragements des résidents.

Actuellement, cet ancien déplacé ne s’inquiète pas pour sa sécurité : « Elle est totale et j’ai été bien accueilli. » Au bout de quatre mois, il a réalisé les résultats positifs de sa décision de rentrer : « Ma femme a, par exemple, aujourd’hui, plus de facilité de trouver du bois de chauffage, de puiser de l’eau, etc ».

Ensuite, les déplacés et les résidents partagent les mêmes travaux champêtres. Alexis Nyandwi, un déplacé, affirme que pour exploiter ses terres d’origine, il a embauché des travailleurs journaliers, Hutu. Un déplacé peut aussi travailler pour un résident, s’il a les moyens de le rémunérer. Cela permet de retisser des liens sociaux entre eux.
Adelin Misuraganyi, conseiller technique de l’administrateur, évoque d’autres actions allant dans ce sens. C’est entre autres le cadre de dialogue initié par Twitezimbere. Il s’agit de causeries organisées à Burasira et à Mureke entre les représentants des déplacés, administration et représentants des résidents, etc.

Pour M. Misuraganyi, cela aboutit à des compromis, comme le retour des déplacés dans leurs ménages, la restitution de la propriété occupée par le site aux anciens propriétaires ainsi que la création d’un village mixte. Jean Désiré Nduwimana, un déplacé, évoque également les actions de la Commission Nationale Indépendante des Droits de l’homme (CNIDH) en vue de trouver des solutions aux situations conflictuelles entre déplacés et résidents.

De son côté, Pierre Ntirandekura, de la colline Rwamiko, ancien locataire du camp de déplacés de Muyovozi en Tanzanie, affirme que certains déplacés sont en train de regagner leur colline : « Moi j’habite tout près du site. La semaine passée, nous avons accueilli une femme déplacée qui venait de regagner son ménage. Et c’est moi qui ai construit sa maison. » Il est facile que le petit peuple se remette ensemble. « Car même si certains ont tué, ils ne sont pas des planificateurs. »

La vérité d’abord

Malgré quelques avancées dans le sens du rapprochement, des réticences se manifestent encore. Certains déplacés jurent par tous les dieux qu’il n’est pas encore temps de rentrer et posent des conditions. « Retourner sur nos terres ne constitue en aucun cas un problème. Seulement, la grande question est que jusqu’aujourd’hui, nous n’avons pas la vérité sur ce qui s’est passé », indique Eliane Nizigiyimana, une déplacée du site de Ruhororo. Cette femme signale qu’ils ont besoin de savoir les causes des conflits, de tout ce qui a amené les Burundais à s’entretuer jusqu’au génocide.

A défaut de la vérité, Mme Nizigiyimana souligne qu’il ne peut pas y avoir de tranquillité, de stabilité : « Nos cœurs restent dans le traumatisme. Des cauchemars empêchent les gens de rentrer. »
Elle estime qu’il est urgent que la Commission vérité réconciliation débute ses activités : « Il faut que la vérité soit connue sur ce qui s’est passé sans chercher des boucs émissaires. Nous avons besoin de la vérité sur toutes les périodes sombres de l’histoire de notre pays ». Des hommes politiques sont pointés du doigt d’avoir été à la base des crimes commis au Burundi. Sans citer de nom, Eliane Nizigiyimana donne l’exemple d’un message lancé à partir du Rwanda, en 1993, appelant les Burundais à défendre la démocratie.

Selon elle, ce message doit être décortiqué pour savoir l’objectif de celui qui l’a lancé. « Puisque après sa diffusion, des gens se sont entretués, etc. » Par ailleurs, cette femme ne comprend pas pourquoi les politiciens ont peur de mettre en place le Tribunal international pour le Burundi.

Du reste, elle estime qu’en retardant la mise en place de la CVR, les politiciens visaient à léguer aux générations futures de mauvaises choses. Et pour Jean Kajandi, il faut que la vérité éclate au grand jour et que le fautif soit puni. Il pense que si les politiciens parviennent à se réconcilier, ce n’est pas au petit peuple de bloquer le processus. « Après les enquêtes de la CVR qui détermineront les causes des conflits, les Burundais pourront bien se réconcilier. »

« Soyez confiants ! »

Adelin Barutwanayo ©Iwacu
Adelin Barutwanayo ©Iwacu

A ceux qui pensent que l’Etat pourra obliger les déplacés à rentrer, Adelin Barutwanayo, Conseiller Technique de l’administrateur de Ruhororo, dit que ce n’est pas possible. Seulement, ceux qui sont rentrés peuvent servir d’exemple. Tout en les rassurant, il demande aux déplaces d’être confiants. Au fil du temps, il espère que beaucoup de déplacés vont se décider de rentrer. Par ailleurs, sans donner le chiffre, il affirme que plusieurs sont sur le point de rentrer. « L’important est que dans notre commune la sécurité soit là. » Et de déclarer : « En tout état de cause, les Burundais doivent vivre ensemble. »

Néanmoins, Jean Kajandi, l’adjoint du chef de colline Miko, soutient que la question du site de Ruhororo a pris un caractère politique, ce qui entraîne des divisions dans les hautes sphères politiques.

Forum des lecteurs d'Iwacu

5 réactions
  1. Moteur C

    C’est quoi un Conseiller technique de la Commune ? Qu’est-ce qu’il fait ? Quels sont les qualificatifs pour l’être ? Merci

  2. Kamariza

    Ensuite, les déplacés et les résidents partagent les mêmes travaux champêtres. Alexis Nyandwi, un déplacé, affirme que pour exploiter ses terres d’origine, il a embauché des travailleurs journaliers, Hutu. Un déplacé peut aussi travailler pour un résident, s’il a les moyens de le rémunérer.

    AU FAIT LES DEPLACES ONT LES MOYENS DE PAYER LES RESIDENTS . EWE RENOVAT SHA

  3. NOM

    ELIANE m impressionne du moins son avis. c’est profond

  4. ndagijimana claire

    Ces mariages interethniques il faut arreter ça,uwuzorongora uwo badasangiye ubwoko kumuharira ivomo nibo badusubiza inyuma

    • Mandela

      hahahahaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaahahhaaaaaa………………………………… Claire, es – tu serieuse ou tu veux nous faire rire hahaaaaaaaaaaaaaahaaaaaaaa….sìl te plait tiens moi un peu huuuuuuhuuuuuu, haaaaaaaaa,…en tout cas merci de me faire si grandement rire ce matin. Je ne suis pas de ton ethnie mais je dois te marier, ca c est sur, je vais te chercher par tous les moyens. Tu me diras que tu es marriee mais jài ma magie ma chere. Je dois te retrouver et tu `m interesses beaucoup et devons vivre ensemble.

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