Mardi 19 mars 2024

Politique

Enrôlement des électeurs au compte-gouttes

02/12/2014 9

Du 24 novembre au 7 décembre, tous les Burundais en âge de voter sont appelés à se faire enrôler. Deux jours après le début des opérations, l’affluence reste faible.

Sur les centres d’enrôlement, la participation n’est pas massive dans les deux premiers jours ©Iwacu
Sur les centres d’enrôlement, la participation n’est pas massive dans les deux premiers jours ©Iwacu

« Nous avons 607.427 inscrits sur tout le territoire national, excepté la province de Cibitoke », a déclaré Pierre Claver Ndayicariye, président de la CENI, ce mercredi 26 novembre, lors d’une synergie des médias. Le constat est que la participation est faible pour diverses raisons. D’après lui, dans les premiers jours, les gens sont plus occupés par des activités quotidiennes. D’autres cherchent encore des documents pour se faire enrôler.

A l’intérieur du pays, cette faible affluence s’observe. C’est le cas de Kayanza dans la commune Gatara. « Les gens n’ont pas encore répondu massivement à cette opération. Moi, je me dirigeais vers d’autres activités, mais constatant que les agents recenseurs chômaient, j’en ai profité pour me faire enrôler », témoigne Rémy Nkwirikiye, un habitant de la commune Gatara, soulignant que la sensibilisation a été faible. « D’habitude, les Burundais se réveillent dans les derniers jours. C’est à ce moment là qu’on va avoir des bousculades sur les bureaux d’inscription », explique Alfred Minani, de la commune Bukinanyana, province de Cibitoke.

A Karuzi, on évoque principalement le problème de l’éloignement des bureaux d’inscription. D’après Blaise Kararumiye, correspondant de la radio Isanganiro dans cette province, dans les communes Gihogazi et Bugenyuzi, dans certaines localités, les gens sont obligés de faire plusieurs kilomètres pour arriver au bureau d’inscription. Il se remarque aussi des hommes qui viennent faire inscrire leurs femmes ou vice- versa, alors que la présence physique est obligatoire, selon la Ceni. D’autres apportent les cartes d’identité de leurs enfants. Une situation signalée également dans la province de Mwaro. Virginie Niyonsaba, membre de la Cepi, indique qu’il y a des collines qui n’ont pas d’établissement scolaire, d’église… Des bureaux d’inscription ont été installés sur d’autres collines. Ainsi, certaines personnes sont obligées de parcours plus de quatre kilomètres pour se faire inscrire. Suite au manque de bureau, l’opération s’arrête en cas de pluie.

Pour la province de Rutana, Jean Bosco Nsabimana, un encadreur d’un bureau d’inscription dans la commune Musongati, a également affirmé que beaucoup de gens se présentent sans carte d’identité. Tandis que d’autres viennent faire inscrire leurs femmes ou vice-versa. Dans la commune Mpinga-Kayove, les conditions de travail des agents recenseurs ne facilitent pas le travail. Par exemple, à l’Ecole Primaire de Kayero, les agents recenseurs n’ont pas de tee-shirt de la Ceni. Un élément important qui pouvait attirer la curiosité de la population et ainsi venir se faire inscrire selon Déo Nyakazi, chef de colline Burandu. Il ajoute que les agents recenseurs sont obligés de demander des chaises et tables dans les ménages environnants. Dans cette province, on évoque aussi la non motivation d’une partie de la population parce que la Ceni a été reconduite, alors qu’elle était contestée en 2010.

Une opération émaillée d’irrégularités

Pour Evariste Ngayimpenda, les Burundais doivent suivre de prêt l’opération d’enrôlement des électeurs ©Iwacu
Pour Evariste Ngayimpenda, les Burundais doivent suivre de prêt l’opération d’enrôlement des électeurs ©Iwacu

A quelques jours du début de l’enrôlement, l’opposition dénonce des anomalies. « Quand une des équipes en compétition dénonce des irrégularités et que l’arbitre ne réagit pas, c’est un signe que le jeu va mal se terminer », déclare Frédéric Bamvuginyumvira, vice-président du parti Sahwanya Frodebu. De son côté, l’Uprona, aile Nditije, indique qu’ils n’ont pas été autorisés d’envoyer leurs mandataires politiques aux centres d’inscriptions. « Or, c’est notre droit absolu reconnu par la Constitution », rappelle Evariste Ngayimpenda, un des ténors de cette aile. Cependant, il appelle tous les Burundais en général et les Badasigana en particulier à se faire enrôler, et à noter les anomalies constatées : « Des preuves sur lesquelles on pourra se baser pour montrer à la Ceni que l’enrôlement a été émaillé de tricheries ».

La société civile relève aussi des manquements. Justine Nkurunziza, présidente de la Coalition de la société civile pour le monitoring des élections (Cosome), constate amèrement qu’un syndrome de tricherie se manifeste chez certains agents recenseurs, etc. C’est le cas des gens qui viennent s’enrôler avec plus de quatre cartes nationales d’identité et qui parviennent à se faire inscrire. Des cartes sans signature sont également utilisées. Selon elle, cela s’est passé au Lycée Gisenyi, dans la commune de Ngagara. Idem dans la province de Muyinga où à l’Ecole Fondamentale Islamique, une personne a été enrôlée sans être physiquement présente. Cette dernière est enregistrée au n°030 dans le registre n°07474. La vérification des nationalités devait aussi être faite. « Dans cette province, un arabe connu sous le nom de Saïd Shabani a été enrôlé sur n°056 sans aucune vérification de sa nationalité ». Elle souligne aussi que dans un pays où beaucoup ne savent pas lire et écrire, les chefs des partis politiques devraient vérifier rigoureusement les récépissés de leurs membres. « A l’Ecole Primaire Bassin I, dans la commune Buyenzi, à Bujumbura, la Cosome a constaté un cas où le nom mentionné sur le récépissé ne correspond pas à celui noté dans le registre. Cela va donc fausser le fichier électoral. » Justine Nkurunziza déplore le manque de professionnalisme et de patriotisme de certains agents recenseurs.

Pour sa part, le président de la Ceni répond que des irrégularités constatées seront corrigées progressivement. Quid des mandataires ? M. Ndayicariye précise que ceux qui veulent des accréditations pour tout le pays doivent s’adresser à la Ceni. Au niveau communal, la permission est demandée à la Ceci.

« Allez doucement et sûrement »

Paul Ngarambe : « « Que la Ceni ne se précipite pas sans motif valable. » ©Iwacu
Paul Ngarambe : « « Que la Ceni ne se précipite pas sans motif valable. » ©Iwacu

« Que la Ceni ne se précipite pas sans motif valable. Il s’avère indispensable de dialoguer avec les partis politiques et de tenir en considération leurs dénonciations afin de trouver des réponses consensuelles », conseille Paul Ngarambe, président de la Ceni en 2005. En effet, si cette opération provoque beaucoup de lamentations, ça présage un mauvais déroulement des élections en 2015. Evoquant une possibilité de prolongation, il estime qu’il n’est pas encore tard : « Normalement, c’est à quatre-vingt dix jours avant la passation du 1er scrutin qu’on peut dire qu’on est en retard. Il y a donc encore du temps pour bien organiser les élections parce que le 1er scrutin va se passer en mai 2015 ». Et de rappeler qu’en 2005 « chaque semaine, une rencontre était organisée avec les politiciens afin de leur montrer l’évolution des travaux et recueillir leurs conseils et si possible les intégrer dans l’organisation des élections. »

Forum des lecteurs d'Iwacu

9 réactions
  1. Ndayiragije

    MBEGA YEMWE ABA DD BARAMENYEREYE KW’iba gushika naho babishira mu gwaruka. Mbega none ko bakomeye, biyambika ibara kubera iki ko bazotsinda; Ayo manyanga birigwa baragira mugutangira uburangamuntu ahantu hinyegeje, mu ma permanences ya CNDD-FDDD, abakuru b’imitumba, jewe mbona ari akajagari. Ico nokwibaza ni kimwe, ni umugambi w’umugambwe canke ni abatware bo hasi bakora uvyo bishakiye canke n’abandi banyamugambwe babikora ku giti cabo. Nimba CNDD-FDD ata mu tware yatumye gutanga uburangamuntu ni yiyamirize ivyo bintu tuvyumve, kandi ababigira bahanwe tubibone, si non bimwe bavuga ko amatora ya 2015 yibwe si ivy’imbeshere. Erega mugabo aba DD ndabumva, harimwo inkandagira bitabo hamwe batagize politique ata kindi bashoboye.

  2. ego

    mwomenyera mukwiyandikisha basaba imyaka ingahe?

  3. Rufyirigufyina

    Chers parlementaires du Burundi;

    Remettez la CENI à Paul Ngarambe car il a été à la hauteur en 2005 et que c’est un homme droit, de vérité: tout le Burundi y gagnerait. S’il avait été reconduit en 2010, on aurait pas assisté à un fiasco électoral qui a ramené le Burundi dans un monopartisme de fait et la dictature qui an a résulté.

  4. Gondwanais Lamda

    Il y en a qui veulent véritablement jouer avec l’avenir de notre pays. Les manquements de la CENI sont là et observable, l’administration est entrain de tout faire pour tricher, en distribuer des cartes d’identité en cachette, en refusant les observateurs d’un côté… Malheureusement nos politiques n’apprennent rien de l’histoire… L’ADC Ikibiri vient de décider de jouer à la chaise vide, c’est quelle stratégie ça Monsieur Léonce?????? Vous voulez les laisser tricher tranquillement sans surveiller leurs actions, sans vous donner les moyens de collecter toutes les preuves de la tricherie qui se met en place???? Il faut mettre un peu d’eau dans votre vin et vous coaliser avec les autres au lieu de laisser le champ libre au mangeurs de la République.

    • umuntu

      moi je pense que l’ADC n’a plu de moyens pour payer leurs agents sur terrain,

  5. Kagoma

    C’est sage le point de vu de Pr Ngarambe, mais je crains que l’ADC ait un agenda caché. Il paraît qu’ils veulent un gouvernement de transition (amagaburanyama) et non les élections, CENI nibumvirize igavye.

    • BUSORONGO

      Ces gens de l’adc ikibi sont habitues aux tricheries tellement qu’ils ne peuvent pas comprendre une certaine logique. D’ailleurs Paul Ngarambe etait oblige a tout faire pour offrir quelques voix au Frodebu et ses acolytes en 2005. il reste egal a lui meme ce Monsieur.
      Pourquoi la communaute internationale s’est empressee a l’oublier?
      Une des raisons a ete cite en haut mais l’autre il n’a jamais brille comme bon organisateur. Il s’etait fait un royaume avec sa famille princiere ce qui n’est pas du tout democratique. Heureusement qu’il ne critique plus tout action de la ceni car pour lui rien ne peut avancer sans lui.

      • Nzobandora

        BUSORONGO
        Continuer à distribuer vos tonnes de carte d’identité sous la bénédiction de votre CENI vous ne saurez jamais à l’abri d’une surprise. Par une telle ampleur des tricheries au moins ce qui est évident vous êtes conscient de votre impopularité même au sein de votre propre camp et cela quoi vous fassiez identités, argents, pagnes, etc., ça ne vous garantira pas la victoire et les burundais sont les champions en matière de rouler les politiciens; la preuve aucune activité de sondage n’est possible au Burundi car les résultats ne pourraient qu’être fausses et loin de la réalité car manque de sincérité.
        A bon entendeur saluto!!!

        • BUSORONGO

          Vous etes tellement fanatiques qu’il vous est difficile de penser logiquement.
          Si on distribait les cartes d’identite par tonnes ou sont les beneficaires? Se sont ils deja enroles? Est ce les 600 milles annonces par la CENI?
          Et si on essayait d y aller methodiquement….
          Alexis a bel et bien annonce les couleurs. « Les elections de 2015 ne sont pas dans ses perspectives politiques ». Il a certe son plan B qu’il n’a pas encore probablement partage avec ses paires. Mais une chose est sur la pretendue opposition ne s’est pas preparee aux elections. Maintenant les acteurs de cet opposition y compris la societe civile aimerait une sorte de chaos, pour negocier et partager le pouvoir qu’ils ne peuvent pas avoir par les urnes. Autrement dit ils se pourrait que la majorite de ceux qui s’insscrivent soit du cote de CNDD-FDD et notre opposition prefere ne pas demander les voix mais plutot forcer. Ceci est une strategie qui peut jouer contre cette meme opposition car beaucoup de burundais s y connaissent bien deja. Si la strategie de partage du pouvoir gagne on va assister a la creation de partis tout juste pour avoir une parcelle du pouvoir. La meme opposition risque d’etre noyee par une multitude de peti parti crees pour la cause.
          Et s’il n y a pas elections en moins d’une annee il y aura un vide de pouvoir et tout aventurier pour se prevaloir le droit de l’exercer. L’opposition a t elle pense a scenario? Si oui a t elle les moyens de dominer cette situation?
          En 2010 ils ont crie au vol et ont avance des raisons comme quoi leurs mandataires etaient parti faute de moyen. Maintenant ces memes partis retirent volontairement leurs mandataires avant les elections mais affirment fot qu’ils vont participer aux elections. On notera que ce retrait a eu lieu apres la reunion de Kampala ou probablement Alexis Sinduhije a pris part. Est ce la continuation du plan Alexis pour quitter les elections?

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