Mardi 23 avril 2024

Politique

Cimetière de Mpanda : quand le vol s’attaque au sacré

Une centaine de tombes sont dégradées au cimetière de Mpanda, commune Gihanga, province Bubanza. Des fossoyeurs accusent certains de leurs camarades d’être responsables de ces actes que la culture burundaise réprouve.

Quelques-unes des tombes dégradées à Mpanda
Quelques-unes des tombes dégradées à Mpanda

« On ne sait plus quoi dire. Ce sont des hommes sans foi ni loi qui s’adonnent à ces actes immoraux », se résigne Salvator Nyandwi, président de l’association Dufashanye, une des associations des fossoyeurs, au cimetière de Mpanda. Il estime à une centaine de tombes partiellement détruites en moins de deux mois. « Celles des militaires et policiers sont les plus visées. Car, leurs tôles sont dures et sont vendues chez les soudeurs de Bujumbura ou menuisiers pour y fabriquer des portes, des fenêtres, etc. »

Pour M.K., un habitant de Buringa, ces actes odieux sont commis en complicité avec certains fossoyeurs. Il fait savoir qu’un d’entre eux, il y a quelques jours, a été attrapé chez lui avec quatre sacs remplis de morceaux de tôles. Et de déplorer qu’après quelques jours d’emprisonnement à Gihanga, il ait été libéré.

Léopold Ndayisaba, administrateur communal de Gihanga, minimise les faits : « Il n’y a pas de problème particulier au cimetière de Mpanda. Ce sont juste des malfaiteurs qui prennent des tôles ». Il dément ainsi que des suspects ont été relâchés : « Seules deux personnes sont en liberté.» Il ajoute aussi que le président de l’association Dufashanye a été arrêté, samedi 5 novembre, pour des raisons d’enquête. Selon lui, des éleveurs de vaches sont également responsables.

Sur place, la scène est affligeante. Des tôles ont été enlevées, des briques éparpillées ici et là, certaines croix jonchent le sol, d’autres tiennent encore à côté de cercueils ouverts. Et la pluie a déjà fait son travail, on entrevoit des cadavres en décomposition.

« Une malédiction »

« Cela montre que nous avons perdu notre culture. Dans le temps, il était même interdit aux femmes et aux enfants de regarder un cadavre », confie Adolphe Ntibasharira, un notable de 69 ans. Pour lui, se permettre d’enlever quoi que ce soit sur une tombe, c’est une pure malédiction. « Il faut que les gens sachent que les richesses venues de tels actes sont maudites et n’apportent que des malédictions à la famille et au pays. »

Culturellement, explique-t-il, quand une personne est morte, les Burundais croyaient et croient, qu’elle ne les a pas totalement quittés. L’endroit était interdit aux éleveurs, aux ramasseurs du bois de chauffage. « Une preuve que le cimetière, la tombe est sacrée, respectée. »

M.Ntibasharira signale que certaines familles construisaient des maisonnettes de culte près des tombes. Il évoque ici l’ « intezi », qui signifie que l’âme d’un ancêtre d’une famille continuait à veiller sur les siens. Il se souvient des dernières paroles que son père lui a adressées : « C’est ici que vous allez m’inhumer afin que je continue à veiller sur vous.»
D’après lui, les auteurs méritent des punitions exemplaires pour décourager cet esprit immoral. « Et il revient au gouvernement de prendre le taureau par les cornes et de protéger de tels lieux », a-t-il conclu.

Forum des lecteurs d'Iwacu

10 réactions
  1. DPQ

    La meilleur façon de résoudre ce problème et en même temps protéger notre environnement est de revenir sur la méthode de nos ancêtres. Gutera Ikivumu, umumanda canke igitagari kuruhafu gwabacu. ainsi nous auront des forets gardiens des notre pour l’éternité.

  2. Jean Bigirimana.

    Ceux qui osent profaner les tombes creusent les leurs. Y a pas plus punition que ca

  3. Nzakaha Zacharie

    Et l’école érigée derrière le marché de Kanyosha qui a fait d’une bonne partie du cimetière de Nyabaranda un terrain de sport pour les élèves; le maire de la ville de Bujumbura encore moins l’administrateur ou chef de zône de Kanyasha n’ont rien dit. Peut être que ce sont eux qui ont autorisé cette profanation.

  4. KABADUGARITSE

    Rien que la partie visible de l’iceberg.-

  5. Maths

    Plusieures question en verite: Combien de positions militaires et policieres avons-nous autour de cette cimetiere de Mpanda??? Tout en supposant que les destructeurs operent la nuit, qui oserait se ballader la-bas la nuit tombee sans etre connectee avec ceux qui controllent le armes dans ce lieu par exemple? Pourquoi l’admin minimise ces actes barbards? Tenez, une tole coute 45000 Fr, fois 100= 4.500.000Fr Bu!!!! Et si cet argent devenait une autre forme de payer ceux qui ont rendu un servce quelconque???

  6. rurihose

    Quelle justice de puissants!!! Quel etonnement selectif!
    Le Burundi est le pays le plus corrompu (et le plus pauvre) au monde. Cela veut dire qu il y a des vols beaucoup plus reprehensibles que celui commis par ces pauvres heres qui volent parce qu ils ont faim.
    Je ne veux pas nommer des gens.
    D ou viennent ces sommes faramineuses pour construire des immeubles d une valeur depassant quelquefois $800 000.
    And last not least; the police is paid to maintain security and order across the country

  7. Burundi

    Quand la morale n’a plus de place dans un pays, quand on ne respecte plus la personne humaine, quand tout est permis, les conséquences sont graves. Ce n’est que le début. Hier c’était la vente des être humaines, aujourd’hui c’est la profanation des tombes… et pourtant on mélange Dieu dans toutes les sauces, n’est-ce pas Mrs, Mmes les » pasteurs »? On comprend tout de suite de quel « dieu » il s’agit quand on voit ce qui se passe.
    C’est épatant , on ne peut pas compter combien de fois le terme Dieu est prononcé dans la conversation des Barundi actuellement; la question est de savoir de quel Dieu il s’agit.

    • nunu

      Burundi we!!!!!!!!!!!!!! Wawundi ati « Tugeze habi  » . TUGEZE HABI KWELI.

  8. Rupande

    Moi ce qui m,etonne de la facon dont les burundais protegent les tombes,en effet il y a pas du respect de nos morts.En titre d,exemple quand vous partez au cimetiere de Mpanda peu sont les gens qui entretiennent les tombes des leurs,apres l,anterement, peu sont les gens qui reviennent revisiter les tombes des leurs,d,ou la plupart des tombes sont couvert par des brousses d,herbes,on dirait que le cimetiere est un endroit pour s,en debarrasser des nos morts,dans d,autres cieux la mairie ou la commune s,en charge de la securite et l,entretien du lieu.Par consequent le vol des toles des tombes est aussi du a la mauvaise entretien des tombes,le cimetiere est un endroit sacre qui devait etre protege.
    Au Burundi seules les tombes des heros de l,independandances et de la democratie sont proteges,alors que toutes les tombes devaient etre protegees.Parceque pour moi mon pere qui est a Mpanda est plus heros que Rwagasore et Ndadaye parceque sans lui je serai pas en vie.

    • Mayugi

      C’est désolant tout ça. Mais je me pose la question à savoir, pourquoi la police nationale ne parvient pas à patrouiller un si petit pays alors que leur nombre est à mon sens pléthorique ? Peut-être qu’il faut se résoudre à pratiquer une forme d’inhumation écologique, c’est-à-dire utiliser uniquement de la terre et bannir le ciment et par après, si l’espace le permet, planter un arbre ou des fleurs par-dessus.

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