Jeudi 28 mars 2024

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Burundi/RDC : présence inquiétante sur l’autre rive de la Rusizi

Quatre postes installés par la Monusco sur la Rusizi le long de la frontière Burundo-congolaise inquiètent les populations de deux pays.L’administration et la police tranquillisent. La Monusco parle de la protection des populations civiles.

Des tentes des militaires de la Monusco dressées à Kanganilo à quelques mètres de la Rusizi du côté de Rugombo.
Des tentes des militaires de la Monusco dressées à Kanganilo à quelques mètres de la Rusizi du côté de Rugombo.

Localité dite Kigobe en commune Rugombo à la rivière Rusizi. Un calme étrange règne. Deux jeunes hommes puisent de l’eau. Pourtant, affirment-ils, ce point de passage vers la RDC était animé de gens tous les jours.

Depuis l’arrivée des militaires de la Monusco (Mission des Nations unies pour la République démocratique du Congo), confient nos sources, personne n’ose s’aventurer autour de la rivière. « C’est le même cas du côte congolais », lâchent-ils.

Quelques mètres en haut de la colline qui surplombe les rives de la Rusizi, un groupe de cinq jeunes hommes, munis de gros bâtons, sont assis sous un arbre. Ils guettent apparemment tout mouvement.A notre approche, ils partent un à un.

Le déploiement a commencé samedi 23 janvier vers 15 heures. Les militaires sont arrivés à bord de plusieurs véhicules militaires, lourdement armés, confient des sources sous anonymat : « Ils avaient des mitrailleuses et étaient accompagnés par deux véhicules blindés et un char de combat. » Ces militaires se sont ensuite dirigés, confie nos sources, vers la rivière Rusizi où ils ont commencé à implanter leurs tentes.

Depuis, quatre postes de commandement sont implantés dans les localités de Kamanyola, Luvungi, Mutarule et Sange : « Des pistes d’atterrissage ont été aménagées et un hélicoptère militaire a commencé à les ravitailler en vivres et en eaux potables », indiquent toujours nos sources.

A Kamanyola, le poste se trouve à 600 mètres de la rivière Rusizi tout près du secteur Rukana de la commune Rugombo en province Cibitoke. Une dizaine de tentes blanches et un Hangar abritant entre 30 et 40 militaires tous en treillis, y sont dressés. Sur place, certainspuisenttranquillement de l’eau à la rivière Rusizi. D’autres passent la journée à serpenter les ruelles, visiblement pour maîtriser l’endroit, un travail de reconnaissance.

Dans la localité de Luvungi, le poste est installé à Kanganilo. Enfuies dans un petit boisement à plus ou moins 1 kilomètre de la rivière Rusizi, les tentes sont à l’abri des regards curieux. Ici comme à Kamanyola, 30 à 40 militaires s’activent, entreposant des sacs de sable visiblement pour se protéger.

La même scène est visible à Mutarule dans la localité de Rubelizi à 4 kilomètres du chef-lieu de la province Cibitoke où des tentes ont été dressées. Seule particularité : un blindé et un char de combat y passent beaucoup de temps mais se déplacent, la nuit tombée. Cette information est confirmée par un agent du SNR à Cibitoke qui a requis l’anonymat.
Le dernier poste de la Monusco est situé à Nyamwoma dans le groupement de Sange à quelques mètres de la rivière Rusizi. Il n’est pas loin du secteur Ndava Village de la commune Buganda.

La population apeurée

L’installation de ces postes de commandement, parfois tous près des habitations a causé une peur panique chez les populations riveraines. Byabule Byadunia, un habitant de la localité de Nyamwoma dans le groupement de Sange trouve étrange cette présence et se pose des questions : « Pourquoi maintenant alors que rien d’étrange ne se passe à la frontière. »Pour lui, cette présence en dit long vu ce qui se passe au Burundi sur le plan politique.

Bitonde N., un pécheur affirme quant à lui que personne n’ose s’aventurer près de la Rusizi à cause de cette présence de la Monusco : « Avant on allait pêcher des tilapias à la rivière mais depuis samedi même ceux qui ont des champs près de cette rivière ont peur de s’y rendre. »

Même son de cloche du côté de Luvungi. « Nous étions habitués à voir les militaires de la Monusco passer, se dirigeant vers Bukavu mais jamais ils ne s’étaient installés près de chez nous avec tout cetarsenal militaire », confie un habitant sous anonymat.

Ndabalo Kimbumbu, un des chefs du groupement de Luvungi confirme ces propos : « Vu leurs armes, des engins militaires qu’ils ont amenés, nous craignons le pire. » Toutefois, Ndabalo Kimbumbu dit avoir tranquillisé les habitants en leur expliquant qu’il va porter leurs inquiétudes à la hiérarchie sans plus de détails.

Cette peur s’est également installée depuis samedi dans les localités proches de la Rusizi. Dans le village Ndava en commune Buganda, des habitants ne se rendent plus dans leurs champs facilement.« Certains sont même partis vers l’intérieur des terres à cause de cette présence», confie un berger rencontré sur place.

Ainsi, Me Joseph Iteriteka, gouverneur de la province Cibitoke accompagnés par des administrateurs communaux concernés et le commissaire de police se sont rendus sur la rivière Rusizi pour constater de leurs propres yeux la présence de ces militaires de la Monusco. Le gouverneur a tenu à tranquilliser la population et l’encourager à continuer à vaquer à ses activités.

« La Monusco fait son travail de tous les jours »

Joseph Iteriteka : « La Monusco fait son travail de tous les jours et ça se passe sur le sol Congolais. »
Joseph Iteriteka : « La Monusco fait son travail de tous les jours et ça se passe sur le sol Congolais. »

Pour lui, la Monusco fait son travail de tous les jours et ça se passe sur le sol Congolais. Et de démentir la fuite des populations de Buganda : « Ce sont des rumeurs sans fondement. Les habitants de ces localités s’occupent de leurs champs comme d’habitude. »

Interrogé, L’officier Eugène Bizindavyi, commissaire de police à Cibitoke abonde dans le même sens et trouve que cette présence ne devrait déranger outre mesure car ces postes se trouvent en RDC : « La Monusco est dans ce pays depuis des années et ces militaires ne se sont pas installés sur le sol Burundais. » Concernant la peur évoquée par les habitants, le chef de police à Cibitoke indique que la population s’était alarmée en voyant des blindés mais qu’elle a été tranquillisée.

A la question de savoir si cette présence aurait des liens avec la venue ou pas de la Maprobu, le commissaire Bizindavyi rétorque qu’il s’agit des spéculations politiciennes à travers les réseaux sociaux de ceux qui veulent voir cette force déployée au Burundi à tout prix. Mais pour lui, rien ne le laisse présager. Propos confirmés par le colonel Gaspard Baratuza, porte-parole de la FDN pour qui le travail de la Monusco se passe en RDC.Malgré ce discours, la sécurité semble avoir été renforcée le long de la frontière depuis dimanche par la multiplication des patrouilles militaires et policières souvent accompagnées par des jeunes Imbonerakure, confient des sources à Rugombo et Buganda.


« Nous avons le devoir de prévenir les violences contre les populations civiles »

Côté Monusco, Charles Bambara, chargé de la communication de cette mission onusienne, indique que cette présence sur la frontière Burundo-Congolaise s’inscrit dans le cadre de protéger les populations civiles du côté congolais  comme du côté Burundais : « Nous en tant qu’organisation des Nations-Unies, nous avons le devoir de prévenir les violences contre les populations civiles. »Bien plus, Charles Bambara précise que cette présence vise à prévenir queles conséquences sur la crise burundaise n’affectent le territoire congolais : « La Monusco veut empêcher des éléments armés d’attaquer le Burundi en provenance de la RDC. »

Concernant les informations faisant état d’un déploiement de la Monusco en vue d’intervenir au Burundi pour protéger les populations burundaises en cas de nécessité, Charles Bambara indique qu’aucune disposition du conseil de sécurité des Nations-Unies n’a été prise à cet égard : « C’est donc le statu quo de notre côté. »

Forum des lecteurs d'Iwacu

8 réactions
  1. Rien d’inquietant mais les Bdais sont yeux.

  2. Q’ils viennent, on va les battre comme on a battu les terroristes qui ont attaque les camps militaires au mois de decembre

  3. cacer

    Loin d’ etre spacialiste des questions militaires, mais l’ explication du porte parole de l’ armee, me laisse sans voix. Comment peut-il trouver normal que des troupes etrangeres ( de l’ ONU) soient mises en etat d’ alert a quelques metres de la frontiere dans une zone connue pour son activites militaire?
    Sous d’ autre cieux, le principe de reciprocite ne fut ce que pour dissuader imposerait que nos troupes soient placees a la meme frontiere, pour parer a toute eventualite.

  4. wanje

    une semaine plus tard, le général Mgwebi ( http://www.jeuneafrique.com/298721/politique/rd-congo-general-derrick-mgwebi-nouveau-chef-de-monusco/ ), qui a supervisé l’établissement de la mission du MIAB( précurseur de la ONUB) au Burundi en accueillant les fdd lorsqu’ils sont sortis de la brousse, et bien , ce général prend les fonctions comme commandant de la MONUSCO et surtout comme commandant de la brigade spéciale (unité contenant les forces spéciales sud africains et artilleries tanzaniens https://en.wikipedia.org/wiki/United_Nations_Force_Intervention_Brigade de 3000 hommes) qui a vaincu le M23 et ce général a le soutient total de l’ONU, la SADC (tz, zimbabwe, SA, malawi… bref les pays qui ont refusé la Maprobu) et surtout de la RDC!

    Comme ça, au cas ou en RDC ça se gâte, elle aura le soutiens non seulement de la SADC mais aussi de l’un des membres pour 2 ans du conseil de sécurité au sein de l’Union Africaine en Afrique centrale : le Burundi. Comment le Burundi a pu déjà obtenir cette place ? Mcezo wa ndani.

    Lorsque vous voyiez Nyabenda et Rwasa faire des aller retours en Afrique du Sud et le président du Sénat aller en RDC, vous les traitiez de clowns.

    Cette crise vous aura en fait ouvert les yeux que le cndd-fdd, ça n’a jamais été rufyikiri, Pie,… les frondeurs. mais bel et bien …Nkurunziza.

    • Mutima

      Wihenze nk’umwana, jusqu’au point où tu ne vois pas le piège qu’a tendu les présidents africains à Peter N. Quand on te dit tu négocies où on intervient, c’est la fin. Certains DD influents et intelligents ont commencé à brasser les cartes pour qu’on ne les ignore pas, dans la nouvelle transition, car c’est de ça qu’il s’agit. Vous avez essayé d’ethniser la crise, provoquant le Rwanda, éliminant des jeunes tutsis, en vain. On a compris votre jeu, et un jour vous paierez individuellement.

      • Quel piege? Il faudrait ouvrir tes yeux et preparer les elections de 2020. Quelle folie politique?

  5. Mayagwa

    La population burundaise n’a rein à s’inquiéter. Je pense que la présence des forces de la MONUSCO sur la frontière burundo-congolaise inquiète plutôt les groupes rebelles burundo-rwandais qui voulaient créer une base-arrière en RDC et faisaient des va-et viens entre le Burundi et la RDC et entre le Rwanda et la RDC.

  6. Ally01

    Populations apeurée???? Peur de quoi??? Tout simplement parce que la Monusco s’installe? La monusco s’installe justement parce que ces gens, villageois congolais ou burundais des environs, souffrent, s’ils ne s’entre-tuent pas comme ils en ont la vieille habitude. C’est ainsi qu’à l’approche d’une force sécurisante, ils tremblent.

    Ils n’ont qu’à cultiver la paix, l’amour du prochain, et la Monusco n’aura pas à déployer ses tentes sur les plaines verdoyantes de Ruzizi.

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