Samedi 20 avril 2024

Société

Burundi : Repenser les médias

Burundi : Repenser les médias
La Voix de Révolution, l'unique radio d'Etat des années 70 (©droits réservés)
16/01/2023 Commentaires fermés sur Burundi : Repenser les médias
Iwacu lance une réflexion sur la presse au Burundi : ses défis et défauts, succès et échecs, leçons apprises de son histoire et ce que l’on peut espérer de son avenir. « Repenser la presse », réflexion initiée et coordonnée par Antoine Kaburahe, (fondateur d’Iwacu) et Armel-Gilbert Bukeyeneza ( ancien d’Iwacu), se veut être un espace de débat ouvert, pourquoi pas contradictoire, toujours dans l’intérêt de la presse burundaise.

Mai 2015. Dans la foulée du coup d’Etat raté, des radios privées sont mises hors d’état de fonctionner. De nombreux journalistes prennent le chemin de l’exil. Les Burundais deviennent orphelins de cette information indépendante et de ces opinions plurielles, avec leurs qualités et leurs défauts. Désormais, il y aura un avant et un après-mai 2015. Sur les ruines fumantes, quelques rescapés, fragiles, chancelants, vont tenter de poursuivre l’aventure. Parmi les survivants, Iwacu « les voix du Burundi ». Le média va payer le prix fort. Cinq mois après la catastrophe de mai, en novembre 2015, le fondateur du journal, Antoine Kaburahe, est accusé d’être impliqué dans « le coup d’Etat ». Le procureur général de la République lance un mandat d’arrêt contre lui. Juillet 2016, le journaliste Jean Bigirimana est enlevé. On ne retrouvera jamais son corps. Quelques années plus tard, quatre journalistes du groupe de presse, Agnès Ndirubusa, Christine Kamikazi, Térence Mpozenzi, Egide Harerimana et leur chauffeur Adolphe Masabarakiza sont arrêtés lors d’un reportage à Bubanza. Accusés d’atteinte à la « sécurité intérieure du pays », ils resteront près de deux ans dans les geôles de Bubanza. Iwacu n’a pas été le seul média à souffrir après le traumatisme de mai 2015. Tous les médias indépendants, à des degrés divers, ont payé cette « rébellion » ou « proximité » avec les auteurs du putsch manqué. Sept de nos collègues seront condamnés à la prison à perpétuité…

Aujourd’hui, à l’intérieur comme à l’extérieur, les médias burundais tentent de survivre. Dans cette situation difficile, il faut garder l’espoir. Pendant quelques années, les Burundais ont goûté à la liberté d’expression. La professeure Marie-Soleil Frère, paix à son âme, qui a beaucoup travaillé avec les médias, avait raison de dire « que ces quinze années où le Burundi a été le laboratoire du “journalisme de paix” ont laissé des traces indélébiles qui rendent impossible un retour total en arrière. Même si les radios se sont tues, on voudrait croire que plus rien ne sera jamais comme avant, comme il y a vingt ans quand seule résonnait la voix de la radio nationale.  » Il faut donc maintenir cette flamme vacillante. Les autorités burundaises devraient comprendre que la multiplicité des médias et la divergence des opinions sont un signe de santé démocratique! Heureusement, le Burundi n’est pas encore « un désert ou un hiver médiatique », écrit l’auteur burundo canadien Melchior Mbonimpa, il faut espérer, dit-il, que « ce recul de la démocratie n’est pas définitif, que nous ne serons pas réduits à dépendre de la rumeur, et que la régression vers la pensée unique n’aura pas lieu, grâce au courage de quelques-uns, de ceux qui veulent. »
La régression vers la pensée unique ne doit donc pas avoir lieu. Il nous faut repenser les médias. Iwacu entame la publication d’une série d’articles de réflexion pour renouer avec cet élan douché par les événements de mai 2015.

Nous avons invité des connaisseurs des médias burundais et étrangers, des journalistes, des chercheurs pour nous aider à mieux connaître l’histoire des médias burundais et contribuer ainsi à la réémergence d’une société plurielle au Burundi. Nous entamons cette série avec Jean-François Bastin. En 2013, notre collègue, en introduction à son cours sur le traitement médiatique de l’actualité au Burundi dans le cadre du Master complémentaire de journalisme à l’Université du Burundi, avait dressé un panorama du traitement de l’information de 1966 à 2013.

Le juriste Gérard Ntahe nous entraîne à la découverte de l’histoire de la législation de la presse burundaise : de la tutelle belge à aujourd’hui, en passant par les républiques militaires, le tournant « démocratique » de 1992, les années tragiques de 1993 à 2002, puis les années de paix et la terrible crise de 2015. Le spécialiste analyse les différentes lois sur la presse, trop souvent mal intentionnées.
Et justement, que faire face à la censure ? Une question complexe. En contournant les pressions de régimes autoritaires, le web peut constituer un outil précieux pour la liberté d’informer. Dans une interview, Antoine Kaburahe rappelle les limites du média numérique au Burundi, mais aussi en Afrique.

Cet espace est naturellement ouvert aux contributions que nous espérons nombreuses et plurielles. Nous souhaitons ici ouvrir une réflexion et un débat.

>> Accéder à toute la réflexion « Repenser la Presse » en cliquant ici.

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