Mardi 16 avril 2024

Politique

Bob Rugurika accueilli en héros

Un jeudi hallucinant

La journée de jeudi 19 février a été marquée par la rentrée triomphale de Bob Rugurika dans la capitale.

Une foule nombreuse se trouvait au niveau de la Gare du nord  ©Iwacu
Une foule nombreuse se trouvait au niveau de la Gare du nord ©Iwacu

A l’annonce de la sortie de Bob Rugurika de la prison de Muramvya, la population a afflué de partout. Depuis la Gare du nord, une foule était massée tout au long de la route Bujumbura-Bugarama. Elle attendait l’arrivée du directeur de la Rpa.

Hommes, femmes et enfants étaient impatients de le voir. D’autres ont préféré prendre la RN1 à sa rencontre. Tout ce monde scandait des slogans et des chansons pour soutenir le directeur de la Rpa. Ils brandissaient des branchages d’arbres, des feuilles de différentes plantes, on dirait un dimanche des rameaux. Que de scènes spontanées de liesse !

A partir de 9 h, la circulation était presque paralysée. Des motos, des vélos, des véhicules et des piétons accouraient de partout pour se rendre au siège de la Rpa. Des femmes avec des enfants sur le dos couraient sans se soucier d’un incident qui pouvait survenir.

Différentes activités étaient au point mort. Le dispositif sécuritaire sur cette route n’était pas renforcé. Il était pratiquement impossible au peu de policiers présents sur les lieux de réguler la circulation.
Quand le cortège de Bob Rugurika est arrivé près du grand rond-point de la Gare du nord vers 10h, des véhicules qui se rendaient à l’intérieur du pays ne pouvaient plus passer. Les conducteurs ont pris la précaution de les garer à côté de la route afin de laisser passer la foule immense qui accompagnait le directeur de la Rpa. En cours de route, jusqu’à la gare du nord, aucun incident n’a été signalé.
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Le siège assiégé de la Rpa

La nouvelle de la libération du journaliste Bob Rugurika a créé une mobilisation d’un peuple joyeux mais révolté contre la police nationale.

Foule en liesse devant les bureaux de la Rpa ©Iwacu
Foule en liesse devant les bureaux de la Rpa ©Iwacu

Depuis très tôt le matin, un petit monde tout sourire était aux aguets devant la RPA. C’est aux environs de 8 heures que, timidement, des gens ont commencé à affluer vers le siège de la Rpa. Des chansons, des cris de joie et des prières d’action de grâce au Tout-Puissant se faisaient entendre partout aux alentours de la RPA.
Les journalistes présents sur les lieux donnaient des interviews. Caméras et appareils photos à la main, d’autres attendaient patiemment dans les enceintes de la RPA la rentrée du directeur.

L’hymne national à l’arrivée de Bob

Lorsque la foule a appris que Bob était proche, ce fut la démence totale. Des femmes étendent leurs pagnes à l’entrée de la Rpa en guise de tapis. Tout véhicule qui passait devant la RPA se voyait couvert de branches d’arbres, de sachets verts, car il pouvait contenir Bob, on ne sait jamais!

Finalement, Bob Rugurika arrivera dans la discrétion à bord d’une voiture banalisée, en compagnie de Gabriel Rufyiri, président de l’Olucome.

Quand la foule s’est rendu compte que c’est Bob qui rentrait, elle a entonné et chanté l’hymne national « Burundi Bwacu » du début à la fin. Les femmes pleuraient, les hommes criaient et ôtaient leurs T-shirts. Quel comble d’émotion !

De la joie à la fureur

Une meute de policiers qui, jusque-là, n’avaient aidé qu’au maintien de l’ordre a commencé à menacer la population. Enragée, la police a intimé à la foule l’ordre de se disperser. Celle-ci n’avait cure de ces menaces, du moment que « son cher » Bob Rugurika était enfin libre. La police a donc tenté d’user de la force, ce qui a fortifié de plus belle la population.

Entre temps, Pierre-Claver Mbonimpa, président de l’Aprodh, était arrivé sur les lieux pour essayer de calmer la situation. Il a demandé au commandant de la police qui menaçait de lancer des gaz lacrymogènes de patienter. Ce dernier semblait être d’accord.

N’empêche. En même temps que la population, M. Mbonimpa sera victime d’un lancement d’une puissante décharge d’eau par la police. Des pierres, lancées aux policiers, ont alors volé de partout.

Et ce n’était qu’un début. Gabriel Rufyiri, bon nombre de journalistes, des gens qui étaient de passage, ont aussi eu droit à cette douche d’une eau bleue. Leurs habits étaient maculés, et la colère se lisait sur les visages. Une chose en entraînant une autre, cette décharge d’eau a également été orientée vers la Rpa. Incroyable mais vrai! La police semblait elle-même dépassée par les évènements.

Et plus la police se laissait aller dans cette folie, plus la foule revenait encore, plus déterminée qu’avant.
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Trois questions à Bob Rugurika

Bob Rugurika, directeur de la Rpa ©Iwacu
Bob Rugurika, directeur de la Rpa ©Iwacu

Bob, quel est votre sentiment à votre sortie de prison ?

J’ai une joie immense et un sentiment de victoire. C’est la victoire de la grande et mémorable famille des journalistes. J’ai un sentiment de reconnaissance envers les journalistes et la société civile qui se sont battus à poings fermés pour ma libération. Ceux qui m’ont arrêté et emprisonné sont ceux qui viennent de me relâcher. Je n’ai été qu’une victime parmi tant d’autres qui subissent des injustices à longueur de journées. Heureusement que moi, j’ai des collègues qui ont crié pour que justice soit faite.

Un mot sur cette affaire pour laquelle vous avez été emprisonné ?

Oh ! Les gens qui m’ont emprisonné sont ceux qui sont impliqués dans l’assassinat des trois sœurs. Je n’ai pas peur de le dire et de le redire, et on continuera à le démontrer. Ils ont sûrement pensé qu’en m’arrêtant l’affaire serait enterrée, mais ils ont tort. Cette affaire doit aboutir, et les assassins devront payer, tôt ou tard.

Que pensez-vous de cette mobilisation de la population ?

Le Burundi est en train de connaître une évolution politico-sociale. Ce soutien que le peuple m’a témoigné prouve qu’il est devenu mûr. Il sera difficile de manipuler la population maintenant, car elle apprend à dire non. Elle est consciente de ce qu’elle désire. Et les médias, et la société civile, tous ont gagné plus d’estime de la population.
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Un mercredi fou

Mercredi a été une folle journée. A l’annonce de la libération de Bob, une foule immense a spontanément convergé vers la Rpa et bravé la police.

Mercredi, 18 février 2014 - Des milliers de personnes devant le bâtiment abritant la RPA après l'annonce de la libération de Bob Rugurika ©R.N/Iwacu
Mercredi, 18 février 2014 – Des milliers de personnes devant le bâtiment abritant la RPA après l’annonce de la libération de Bob Rugurika ©R.N/Iwacu

Il est 11 heures 30. Le public apprend que la Cour d’Appel de Bujumbura vient de sortir la décision de mise en liberté provisoire du directeur de la Rpa. Une sortie conditionnée entre autre par le paiement d’une caution de 15 millions Fbu. Subitement, une foule se déverse sur les routes. En liesse, spontanément, motards, taxi-vélos, vendeuses de fruits, chômeurs, etc., se dirigent vers la Radio publique africaine.

12h30. Du monument des martyrs de la démocratie à l’immeuble l’Orée du Golfe, c’est la cohue générale. Enthousiaste, la foule scande : «Vive Bob, vive la Rpa », « La vérité finira par éclater au grand jour », « Enfin la justice vient de lire le droit »…

La police dévie la circulation : les véhicules en provenance de l’aéroport et du Congo passent par le quartier asiatique pour arriver au centre ville. Ambiance aussi électrique au centre ville.

Vers 13 heures 30, des centaines de jeunes sont dans la rue. Les uns arborent des gilets en sachets verts. D’autres brandissent des feuilles vertes de bananiers ou des rameaux de palmier.Ils arrachent tout ce qui est vert (couleur de la tenue des prisonniers). A pas de course et toujours scandant des slogans, la foule passe devant l’immeuble dit « Grand bureau » abritant entre autres le ministère de l’Intérieur et de la Justice. Ils empruntent le boulevard de l’Uprona pour se joindre à la foule devant la Rpa.

La police est sur les dents. Cela risque de dégénérer. La police survient alors avec deux camions anti émeute. Jamais public de Bujumbura n’avait vu de tels engins. La foule prend peur. Une partie file vers la cour intérieure de la Rpa, une autre détale dans toutes les directions. C’est le sauve qui peut. Une autre, enfin, reste stoïquement sur place. La police est calme. Leur chef s’entretient avec le directeur a.i. de la radio. Celui-ci demande à la foule de quitter les lieux dans le calme. Elle s’exécute.

Deux camions anti-émeute la suivent. A l’aide des mégaphones, les policiers à bord de ces camions demandent à la foule de vider les lieux. Au lieu de partir, par curiosité, certains approchent plutôt les camions neufs. Les policiers les surveillent attentivement. Du haut de l’immeuble Old East, l’ambassadeur du royaume des Pays-Bas observe la scène à partir de la fenêtre de son bureau. Les policiers menacent alors d’user de la force pour disperser cette foule et tous les manifestants finissent par retourner tranquillement chez eux.
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Rebondissement !

La nouvelle tombe comme un couperet. Dans la soirée, au moment où les avocats de la défense se lamentaient sur les ondes de la Rpa du refus du parquet de signer le billet d’élargissement de Bob Rugurika, on apprend qu’un véhicule de la police en provenance de Bujumbura est arrivé à Muramvya. Mission : extraire en catimini Bob Rugurika de la prison de Muramvya pour le conduire à la faveur de la nuit à Bujumbura.

D’après les journalistes sur place, Bob Rugurika refuse de monter dans le véhicule alors que la police semblait être décidée de l’embarquer manu militari.

La Rpa retransmet alors en direct la voix de son directeur qui refuse d’embarquer la nuit. Tout le pays est quasiment pendu sur les ondes de la Rpa. « Toute la journée ils ont refusé de me laisser partir malgré la décision prise. Où veulent-ils m’emmener maintenant la nuit ? S’ils veulent me tuer qu’ils me tuent sur place ? » s’écrie Bob Rugurika dans la cour de la prison de Muramvya. Surréaliste.

Au même moment, le ministre de l’Intérieur est à la Radiotélévision nationale. Edouard Nduwimana explique que des mesures de sécurité ont été prises pour éviter que la libération de Bob Rugurika ne donne lieu à de nouvelles manifestations spontanées. Il faisait allusion à celles qui ont eu à Bujumbura après le prononcé de la décision de la mise en liberté provisoire du directeur de la Rpa.

Finalement, sous la pression, la police le laisse regagner sa cellule. Il y passera une nuit de plus.
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La lumière au bout de la prison

La Cour d’Appel de Bujumbura a pris la décision de mise en liberté provisoire de Bob Rugurika. Satisfaction mitigée côté de la défense.

Me Lambert Nigarura « « Je suis satisfait du jugement  rendu par la Cour d’Appel » ©Iwacu
Me Lambert Nigarura « « Je suis satisfait du jugement rendu par la Cour d’Appel » ©Iwacu

C’était un Lambert Nigarura au zénith dès 11h30 de ce mercredi 18 février après le prononcé du jugement accordant la liberté provisoire au directeur de la RPA emprisonné depuis bientôt un mois.

« Je suis satisfait du jugement rendu par la Cour d’Appel », proclame à chaud Me Nigarura. Il félicite la Cour d’Appel pour avoir rejeté la requête du ministère public (et même de l’exécutif) de conditionner la liberté provisoire de Bob Rugurika à la production devant le parquet du criminel qui affirme être l’auteur de l’assassinat de la troisième sœur. Il vous souviendra que c’est justement l’assassinat de trois sœurs italiennes en septembre 2014 qui fait objet de l’emprisonnement du directeur de la Rpa.

Mais, après lecture attentive de l’ordonnance motivée, son visage s’assombrit. L’avocat passe à la charge. Il s’en prend à l’ordonnance qui conditionne la sortie de prison de Bob Rugurika au versement d’une caution de 15 millions Fbu, une somme qu’il juge exorbitante.

La balance penchait du côté du ministère public

Bien plus, Me Nigarura n’est pas du tout content de la motivation de la Cour d’Appel aux cinq moyens d’appel de la défense. Pour lui, même si la décision finale aura été la mise en liberté provisoire de son client, à travers la lecture de l’ordonnance motivée, il apparaît évident que la cour d’Appel a pris effet et cause pour le ministère public.

Précisément, Me Nigarura n’est pas du tout satisfait que, comme le premier juge, la Cour d’Appel ait accédé favorablement à la requête du ministère public de juger Bob Rugirika sur base du Code pénal de droit commun. Pour lui, si poursuites devraient y avoir, elles se feraient suivant la Loi sur la presse. Celle-ci dépénalise les délits de presse.

Me Nigarura s’inscrit aussi en faux contre les indices de culpabilité relevée par la Cour d’Appel. C’est entre autres le fait qu’il déclare que Bob Rugurika a interviewé un criminel qui a tué la troisième sœur et a laissé partir le criminel au lieu de le signaler aux forces de l’ordre « même s’il savait très bien que le criminel était recherché ». C’est aussi quand le deuxième juge soutient qu’il y a des indices que le directeur s’est rendu coupable de la violation du secret d’instruction,…
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«La demande du ministère public était irrégulière, irrecevable pour manque de base légale. »

Me Kiyuku Salvator, bâtonnier de l’Ordre des avocats près la Cour d’Appel de Bujumbura relève des irrégularités dans la décision de la Cour d’Appel.

Me Salvator KiyukuQuel est votre sentiment après la décision de mise en liberté provisoire de Bob Rugurika ?

Je suis très satisfait. La mise en liberté provisoire de Bob Rugurika c’est la victoire de la vérité, de la liberté sur l’arbitraire et la répression aveugle.

Avec -vous des observations à faire ?

Mes observations sont de deux ordres. D’abord, je réalise que la caution est effectivement une des grandes lacunes de l’ordonnance des juges de la Cour d’Appel. Cette juridiction aurait dû déclarer la demande de la caution irrecevable.

Pourriez-vous expliciter davantage ?

Le ministère public n’a pas la qualité et surtout la prérogative de demander la caution car conformément à l’article 116 du Code de procédure pénale, cette prérogative est réservée uniquement à l’inculpé.
En requérant une caution, le ministère public reconnaissait ipso facto qu’il n’avait pas d’indices sérieux de maintenir Bob Rugurika en détention.

Quelle est la seconde observation ?

Le texte légal. C’est la loi sur la presse qui aurait dû être utilisée parce que c’est pendant l’exercice et à l’occasion de ses fonctions, et surtout en tant que journaliste qu’on lui reproche ces infractions.
Il n’aurait pas commis ces infractions s’il n’avait pas les outils et les moyens de la presse. Par conséquent, c’est la Loi sur la presse qui doit s’appliquer en cette circonstance surtout que la loi spéciale prime sur le droit commun.

Que dire du juge ?

Le juge n’a pas suffisamment approfondi la loi, peut-être par manque d’indépendance ou par paresse intellectuelle. Il n’a pas fait d’effort pour motiver sérieusement son jugement parce qu’il aurait remarqué que la demande du ministère public était irrégulière, irrecevable pour manque de base légale.

Au regard de certaines décisions des magistrats, d’aucuns commencent à mettre aussi en doute leur compétence…
Nos magistrats ont un bagage intellectuel et un cursus suffisants pour pouvoir départager les parties ou juger les procès qui leur sont soumis.
Pour la plupart, ils ne sont pas indépendants. Ils ont les mains liés et ils tranchent selon le bon vouloir des autorités supérieures surtout dans des dossiers à connotation politique

Mais il y en a qui sont indépendants…

Il y a d’autres magistrats qui sont suffisamment indépendants, neutres et impartiaux. Mais comme ils sont bien connus par les décideurs, on ne leur confie pas ce genre de dossiers dits « brûlants ». Les autorités ont peur qu’ils tranchent en âme et conscience et selon ce que requièrent la science, le droit et la loi.

Quel conseil aux futurs juges de fond du dossier Bob Rugurika ?

Je suggère la lucidité, une lecture attentive de la loi en déclinant leur compétence. Si par extraordinaire cette compétence était retenue, déclarer les poursuites du ministère public non avenues en acquittant purement et simplement Bob Rugurika et ce sera justice.
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>>> Réactions

Pierre Claver Mbonimpa : «Une décision motivée par la pression internationale »

Pierre Claver MbonimpaLe président de l’Aprodh salue la libération du directeur de la Rpa. Néanmoins, il trouve que la caution de 15 millions est une somme exorbitante. D’après lui, les juges ont pris cette décision tout en sachant que Bob Rugurika ne peut pas avoir ce montant : « Combien de Burundais peuvent avoir cet argent ? » Toutefois, le président de l’Aprodh se veut rassurant : «Ceux qui soutiennent la Rpa et son directeur sont nombreux, nous allons contribuer car la liberté prime sur toute autre chose. » Pierre Claver Mbonimpa constate que cette décision vient de tomber suite aux fortes pressions nationales et internationales, surtout les menaces de l’Union européenne. Il demande aux juges d’être indépendants et de lire le droit afin d’éviter des sanctions sur le Burundi.

Alexandre Niyungeko : « Rien ne vaut la liberté »

Alexandre NiyungekoLe président de l’Union Burundaise des journalistes (Ubj), salue la décision de la Cour d’Appel de libérer provisoirement Bob Rugurika : « C’est une satisfaction même s’il s’agit d’une liberté provisoire car rien ne vaut la liberté. » Toutefois, le président de l’Ubj fustige le fait que le parquet ait refusé de signer le billet d’élargissement pour le directeur de la Rpa.Concernant la caution de 15 millions de Fbu, M. Niyungeko estime que c’est une somme énorme, difficile à mobiliser. Il a tenu à remercier tous ceux qui ont contribué à la libération de Bob Rugurika. Et de demander que les vrais coupables des trois sœurs italiennes soient traduits devant la justice pour redorer l’image du Burundi.

La maman de Bob : « S’il pouvait embrasser une autre carrière!»

Maman BobBob Rugurika vient d’être libéré sous caution. Sa mère est parmi les premières personnes arrivées à la prison de Muramvya. Elle s’est précipitée auprès de son fils pour partager ce moment tant attendu. Depuis son emprisonnement le 20 janvier, la maman n’a pas arrêté de soutenir son fils dans ces épreuves. Mais elle avoue qu’à un certain moment, elle avait perdu tout espoir vu les charges retenues contre lui. « Mais Dieu a entendu nos prières et nous a exaucé », raconte-t-elle, émue et impatiente de voire son fils, libre enfin. Elle est reconnaissante envers la justice burundaise qui vient de faire preuve d’indépendance. Cependant, elle demande à cette dernière de ne pas toujours se précipiter à punir quelqu’un en l’emprisonnant mais de toujours mettre en avant la vérité et la sagesse.
Cependant la mère de Bob garde une certaine appréhension. Elle a peur pour la vie de son fils : « Je sais que je n’ai pas le droit de dire à mon fils ce qu’il doit faire, j’aurais aimé tout de même qu’il embrasse une autre carrière. » Selon elle, Bob Rugurika est quelqu’un d’audacieux, cherche toujours à aider les gens, n’a pas peur s’il s’agit de dire la vérité. Cependant, elle lui demande d’être prudent et vigilant vu le contexte socio-politique qui règne actuellement dans le pays.

Forum des lecteurs d'Iwacu

9 réactions
  1. NTARUGERA SEMIGABO

    L’épopée de l’arrestation et la libération de Bob Rugurika : quelles leçons tirer pour le Burundi ?

    Par Ernesto RUGAMBA

    Depuis la lancée imprimée par son fondateur, Alexis Sinduhije, la Radio Publique Africaine, est une radio très engagée, comme son slogan l’annonce c’est effectivement « la Voix des Sans Voix », aux côtés des pauvres, pour clamer très haut la vérité tue. Mais elle est aussi une lanceuse d’alerte qui fait vibrer la corde de l’intégrité dans un pays où l’élite au pouvoir a sombré dans la médiocrité, la corruption, la tyrannie et est devenue progressivement l’incarnation de l’anti-modèle. Première radio écoutée du Burundi selon un audimat réalisé en 2008, elle charme ses admirateurs et hante ceux qu’elle a dans sa ligne de mire. Elle s’est imposée suite aux révélations sur les montages de putsch qui avaient entraîné l’emprisonnement de l’ancien Président Domitien Ndayizeye, de son ex vice-président
    Alphonse Marie Kadege, en plus torturé et humilié. C’est une radio qui développe le journalisme d’investigation et qui ose.

    Un pouvoir fatigué en panne d’imagination : l’effet boomerang

    Ce 15 janvier 2015, la RPA avait décidé de lancer un pavé dans la marre avec deux révélations fracassantes. Le détournement des taxes fiscales perçues sur les appels téléphoniques après leur placement sur un compte privé, et le retrait des fonds par des privés, et la révélation sur les auteurs présumés de l’assassinat des trois soeurs italiennes de la paroisse Guido Mario Conforti. L’affaire des taxes, quoique grave, n’a pas suscité le courroux des responsables concernés, parce qu’aucun nom
    n’avait été cité. En revanche, en révélant le nom des présumés assassins des soeurs comprenant le Général Adolphe Nshimirimana et d’autres hauts gradés, les choses ne pouvaient pas en rester là. Dans la logique du pouvoir et de ses pratiques, Bob Rugurika, qui avait pris lui-même les risques de prendre
    le micro pour s’exposer les éléments de ce dossier, ne pouvait que payer, par la prison, voire, la mise à mort.

    Le pouvoir, est encore une fois, bêtement tombé dans le piège.

    Alors que le dossier de l’incarcération du défenseur des droits de l’Homme, Pierre Claver Mbonimpa, devenue une patate chaude entre les
    mains du Gouvernement, n’était pas encore refroidie. L’ordre donné à la justice d’embastiller Bob
    Rugurika a eu plusieurs conséquences. La première est que le Gouvernement a réussi une prouesse extraordinaire en transformant un directeur de radio ordinaire, certes doué et engagé, en une icône, voire un héros, derrière lequel se sont rangés de nombreux citoyens burundais et une grande partie de la communauté internationale, qui n’a cessé de menacer le Burundi de sanctions.

    L’image du Burundi et surtout de son régime en a été sérieusement écornée.

    La communauté internationale considérait l’emprisonnement de Bob Rugurika, comme l’incarnation suprême de la violation des droits de l’homme et de la démocratie. De nombreux citoyens burundais, surtout les jeunes, prenaient Bob Rugurika, comme le symbole de ce qui lui manque aujourd’hui le plus, un modèle d’intégrité, de
    bravoure et de justice. De plus, alors que le pouvoir aurait pu fournir des preuves pour démontrer que la RPA s’était trompé, l’emprisonnement de Bob retentissait comme un aveu supplémentaire et presque une revendication que l’assassinat des soeurs était un crime d’Etat.
    Le déplacement inopiné de Bob Rugurika vers la prison de Muramya et sa mise au cachot, au lieu de l’isoler comme le souhaitait le pouvoir, a transformé sa geôle en un lieu de pèlerinage, où se bousculaient des personnalités burundaises et internationales. Des députés allemands au Nonce apostolique, l’Ambassadrice des Etats-Unis et d’autres représentations diplomatiques, et de hautes personnalités civiles et religieuses. De ce fait, Bob Rugurika, mobilisait plus de visites que toutes les
    personnalités publiques réunies, damant le pion même au Président de la République. Bref, un véritable effet boomerang s’est produit ramenant ce projectile dans la figure de ceux qui l’avaient lancé. Quand la peur change de camp Alors qu’auparavant toutes les manifestations, quelle que soit leur ampleur étaient soit interdites à
    l’avance ou dispersées par la police, les manifestations des journalistes contre l’emprisonnement de Bob Rugurika, n’ont pas été interdites. Les responsables n’ont pas agi dans le sens habituel, car étant certainement tenaillés et tétanisés par les pressions diverses. De ce fait, ils ont ouvert la voie sans le vouloir, à des manifestations plus osées, en abattant ainsi psychologiquement le mur de la peur. Comme si à Bujumbura, aussi, résonnait dans sa pure réalité, le fameux mot d’ordre du pape Jean Paul II « N’ayez pas peur », lancé le 22 octobre 1978, qui a galvanisé les peuples pour abattre le mur de Berlin et faire crouler les dictatures communistes de l’Europe de l’Est. Les bévues et les maladresses aussi intempestives et que permanentes du pouvoir et de sa justice ont fait le reste pour galvaniser les énergies citoyennes contre ce système. Nul ne croit vraiment aux déclarations que la justice aurait redoré son blason en libérant ce prisonnier gênant. Encore une fois ce sont les injonctions de l’Exécutif suite aux pressions et menaces de sanctions, spécialement celles de l’Union Européenne, dans le cadre des accords de Cotonou, qui ont « fourni » la clé de la prison. Cette fois-ci, le pouvoir n’a même pas gonflé ses pectoraux en claironnant que la justice et le pays sont souverains et que la libération n’est en aucune façon liée aux pressions extérieures.

    La manifestation spontanée et massive qui a eu lieu suite à la libération de Bob Rugurika, est un signe que le pays est en train de changer profondément, d’abord en se défaisant de la peur et ensuite en montrant un attachement indéniable aux valeurs positives, et une défiance total vis-à-vis du pouvoir.

    Pour s’en convaincre il suffit de se rappeler les slogans lancés « Pouvoir, où avez-vous mis la vérité », « où est passé le marché central », etc. Cela signifie que plus rien ne sera comme avant. Cette mobilisation sans précédent augure de possibles autres mobilisations sur des thèmes sensibles d’intérêt national y compris sur le troisième mandat. Pour les optimistes, ces manifestations ont été une sorte de répétition générale de ce qui pourrait y avoir si Pierre Nkurunziza, comme il va vraisemblablement le faire, annonce sa candidature au troisième mandat.

    Après la tentative avortée « d’enlever » Bob de sa prison pendant la nuit, des citoyens de Muramvya, et d’autres venus d’ailleurs, se sont mobilisés pour monter la garde autour de la prison, acceptant d’affronter la rigueur du froid de Muramvya.

    Les signes de la détermination sont là. L’unique performance du CNDD-FDD est d’avoir démontré que la mauvaise gouvernance n’est pas une affaire d’ethnie.

    Avec raison, les régimes à prédominance tutsi qui se sont succédé depuis l’indépendance, par différents crimes, erreurs et égarements commis, avaient fini par installer dans la tête de nombreux Burundais, spécialement des Hutu, l’opinion selon laquelle la mauvaise gouvernance est une affaire de Tutsi. Du coup, les Hutu bénéficiaient d’une sorte de virginité politique, et une présomption naturelle de bonne gouvernance. En presque dix ans de pouvoir, le CNDD-FDD a magistralement fait la démonstration inverse. La gabegie, la prédation, l’impunité, la corruption, le mensonge, l’inefficacité et le crime érigés en système de gouvernement par le CNDD-FDD ont démontré aux Burundais que la mauvaise gouvernance n’a rien à voir avec l’ethnie. Et en dépit de pratiques et de propagande ethnistes au sommet de l’Etat pour galvaniser les Hutu et montrer que le CNDD-FDD est le champion de la cause hutue, la population burundaise a compris. Une évolution sans précédent s’est opérée. Jamais depuis les crises cycliques que le pays a connus et les contentieux qui les caractérisent, autant de Hutu ne s’étaient mobilisés pour soutenir un Tutsi.

    Rien ne sera donc plus comme avant.

    Les colonnes de manifestants composées de jeunes, garçons et filles, mères et pères, Hutu et Tutsi qui se sont retrouvés pour fêter dans l’euphorie la libération de Bob Rugurika, ont lancé le signal qu’une page au Burundi vient d’être tournée. Espérons que le message a été bien capté par tous. Peut-être que le temps du printemps burundais commence à sonner.

    Merci bien à Bob Rugurika, qui par son courage, sa détermination et son sacrifice, a permis au peuple burundais de découvrir son potentiel. Comme du temps de Rwagasore, aucun doute que le peuple burundais uni, se prépare à écrire une lumineuse nouvelle page de son histoire. En lettres d’or

    • NDABARAMUKIJE,BARUNDI BAGIFISE UMUTIMA WUGUKUNDA UBURUNDI NABARUNDINUKURI SINDABABESHA,ISOHOKA RYA BOB RUGURIKA MURAKO KAGA,MUKABONA NISEGENYA RYABAJE KUMUSHIGIKIRA RIRIMWO UBWOKO BWOSE,IRYO SEGENYA RIGATAHUKA AMAHORO NAHO IGIPOLISI CAGOMVYE KUBAKUBITAMWO IBIBONONERA UBUZIMA BWABO,BIREREKABNA YUKO ABARUNDI,HARIMWO NABA CNDDFDD NYENE,KO BARI BANYOTEWE UMUCO NAMAHORO KUBIRIKO BIRABA MU GIHUGU.BAHORA BAVUGA NGO HERO NATIONAL?RUGURIKA NI HERO NATIONAL.BURYA UBURUNDI NTIBUZORWA MWISANGANYA.IRYAVUZWE NUMUGANWA ATARI UMUGANI RWAGASORE LOUI

  2. Terimbere

    Mon pays, le Burundi!!!
    Je n’ai jamais ete aussi fier d’etre Burundais!
    Vive le Burundi et son peuple!
    Felicitations a Bob et aux medias burundais!
    La journee du 19 Fevrier est entree dans l’histoire de notre cher pays!
    C’est le jour ou le peuple burundais montre ce qu’il hait le plus a savoir l’injustice et ce qu’il adore le plus a savoir la liberte!
    Le jour ou la liberte remporte face a la tyranie et l’unite acheve la peur!
    Que nos dirigeants comprennent, que comme une bicyclette, notre combat pour un Etat de droit n’aura pas de marche en arriere!
    Je remercie sincerement a nos freres les Bobs, Rufyiris, Mbonimpas, Pacifiques, aux medias de coeur et a la societe civile, tous ceux qui mettent leurs vies en danger pour le bien de notre pays!
    Je pense qu’au moins cette fois, ils ont compris!
    Ils n’ont pas besoin de lire les rapports ou de demander des avis a qui que ca soit!
    Ils ont les yeux pour voir et les oreilles pour entendre!!
    Ils viennent de comprendre qu’ils n’auraient pas du envoyer les Imbonerahagufis en RDC, qu’ils n’auraient pas du emprisonner INTAMA yacu, qu’ils seraient en meilleures conditions si ces soeurs seraient toujours en vie!
    Et ils ont aussi compris que ca valait pas la peine d’etouffer les enquetes, d’emprisonner injustement un fou ou un journaliste en exercice de son metier! Et pire encore l’amener a l’interieur du pays etait la plus bete des idees!
    Rappelez-vous cher dirigeants:
    1. Uburundi burimwo abagabo!
    2. Le peuple tient a ses aspirations et elles ne sont pas negociables!
    3. Le Burundais, plus petit qu’il soit ne se vend pas aux encheres!

  3. Terimbere

    Je n’ai jamais ete aussi fier d’etre Burundais!
    Vive le Burundi et son peuple!
    Felicitations a Bob et aux medias burundais!
    La journee du 19 Fevrier est entree dans l’histoire de notre cher pays!
    C’est le jour ou le peuple burundais montre ce qu’il hait le plus a savoir l’injustice et ce qu’il adore le plus a savoir la liberte!
    Le jour ou la liberte remporte face a la tyranie et l’unite acheve la peur!
    Que nos dirigeants comprennent, que comme une bicyclette, notre combat pour un Etat de droit n’aura pas de marche en arriere!
    Je remercie sincerement a nos freres les Bobs, Rufyiris, Mbonimpas, Pacifiques, aux medias de coeur et a la societe civile, tous ceux qui mettent leurs vies en danger pour le bien de notre pays!
    Je pense qu’au moins cette fois, ils ont compris!
    Ils n’ont pas besoin de lire les rapports ou de demander des avis a qui que ca soit!
    Ils ont les yeux pour voir et les oreilles pour entendre!!
    Ils viennent de comprendre qu’ils n’auraient pas du envoyer les Imbonerahagufis en RDC, qu’ils n’auraient pas du emprisonner INTAMA yacu, qu’ils seraient en meilleures conditions si ces soeurs seraient toujours en vie!
    Et ils ont aussi compris que ca valait pas la peine d’etouffer les enquetes, d’emprisonner injustement un fou ou un journaliste en exercice de son metier! Et pire encore l’amener a l’interieur du pays etait la plus bete des idees!
    Rappelez-vous cher dirigeants:
    1. Uburundi burimwo abagabo!
    2. Le peuple tient a ses aspirations et elles ne sont pas negociables!
    3. Le Burundais, plus petit qu’il soit ne se vend pas aux encheres!

  4. Mutetsi

    Aba dd ga yemwe. Nta bara batazotuzanira ! Kurekura umu tera bwoba koko ! Birababaje. Igihugu cononekaye kabisa.

  5. Ntahitangiye

    Merci à Maman Bob Rugurika pour les conseils qu’elle donne non seulement à son fils mais à nous tous. Même si vous pensez détenir » la vérité » (les Français disent que toute vérité n’est pas bonne à dire), la majorité de ceux qui vous applaudissent pour avoir dit la « vérité » sont des menteurs. Quand vous direz quelque chose contre leurs intérêts ils seront contre vous. Il est très important de tenir compte des conseils de sa mère. Soyez prudent et vigilant vu le contexte socio-politique non seulement national mais aussi international. Voici la situation du monde actuel : « Je te félicite , je t’applaudit, je t’encourage, quand tu parles en faveur de mes intérêts « . Le reste , vérité ou pas n’intéresse personne.

  6. borntomakelovenotwar

    Au Burundi, on peut manifester pacifiquement sans matraques. Que c’est bon et beau !

  7. rita

    Bon article, actions et réactions louables de la part de la population, belle analyse de Me Kiyuku, go ahead everybody. Mais je doute fort sur la bonne foi de l’exécutif de vouloir éviter les manifestations spontanées en organisant la descente nocturne de Bob! Quant à la maman qui s’inquiète, « Bob Yezu aramubona,aramukunda » comme disait le jeune enfant, et il n’y a pas de métier à risque zéro. L’exécutif devrait aussi comprendre et se souvenir que « plus on remue l’ordure, plus elle pue », pour gérer des questions aussi sensibles que celle-ci! Il serait plus sage de se garder de toujours souffler sur la braise! Il aurait pris le temps nécessaire de travailler (ou faire semblant de travailler) sur les pistes annoncées par la rpa, et il y aurait moins de bruit autour de ce dossier, et partant il ne serait pas discrédité tant en interne qu’en externe du pays!

  8. Lony

    Que c’était beau ces deux journées.
    Imbere ni neza comme dirait notre cher Président.
    Proud tout be Burundian

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