Vendredi 29 mars 2024

Société

Affaire gribouillis : deux poids et deux mesures 

Certains élèves accusés de gribouillage sur des photos du président Nkurunziza dans des manuels scolaires sont renvoyés tandis que d’autres sont emprisonnés. Pour sa part, le ministère de l’Education parle d’un même mot d’ordre donné partout.

Juma Edouard : « L’important est que la sanction frappe les véritables coupables. »
Juma Edouard : « L’important est que la sanction frappe les véritables coupables. »

Le dernier cas en date est celui de 76 élèves des classes de 8ème et 9ème du lycée Ruhinga, en commune Mugamba, qui avaient été définitivement renvoyés de l’école la semaine passée, accusés d’avoir gribouillé la photo du chef de l’Etat. Ils ont été rappelés pour regagner l’école, ce 20 juin.

Firmin Bucumi, directeur provincial de l’Enseignement à Bururi, explique qu’il faut éviter de prendre des sanctions collectives : « Nous les avons rappelés pour qu’ils continuent leurs examens en attendant que les enquêtes prennent fin et que les vrais fautifs soient punis. »

Le même traitement s’est opéré lorsque le phénomène éclate fin mai avec la découverte de gribouillis sur des photos du président Pierre Nkurunziza dans des manuels scolaires dans la localité de Ruziba, en commune Kanyosha, au sud du pays. Dans certains livres, les yeux du président avaient été crevés, dans d’autres, c’est sa photo qui était gribouillée… Une centaine d’élèves seront directement renvoyés par le directeur de l’école. Mais ils sont très vite rappelés après une réunion avec des parents d’élèves et l’administration locale.

En mairie de Bujumbura, c’est dans une école de la zone Kinama que ce phénomène a été rapporté. Là ces élèves ont été contraints de payer de nouveaux livres scolaires et l’affaire s’est estompée. Dans les quartiers nord de la capitale, plus de 3 000 élèves ont été sommés de remplacer les livres abîmés, sous peine de ne pas pouvoir passer les examens de fin d’année, selon un responsable local de l’enseignement, sous couvert d’anonymat.

En date du 14 juin, la police a arrêté quatre élèves du lycée communal de Cankuzo, accusés de gribouillage sur la photo de Pierre Nkurunziza. Le procureur de la République à Cankuzo les a auditionnés et a décidé de les maintenir en détention au commissariat de la police.

« Les élèves reconnaissent que ce qu’ils ont fait est répréhensible »

Trois jours après, quatre élèves du lycée communal de Buhiga en province de Karuzi sont arrêtés par la police. Ils sont également accusés de gribouillage des photos du Président Nkurunziza. Ils seront emprisonnés tout comme leurs camarades de la province de Cankuzo.

Bien plus, 11 lycéens ont été inculpés, le 3 juin dernier, d’outrage au chef de l’Etat et écroués après des échauffourées avec la police et des agents du service national des renseignements. Six des 11 élèves seront remis en liberté provisoire le 7 juin par le Parquet de Muramvya, alors que cinq élèves sont toujours en détention pour être poursuivis comme majeurs. Ces cinq élèves ont comparu devant la chambre de conseil du Tribunal de Grande Instance de Muramvya, le 10 juin 2016. Les juges ont décidé de les maintenir en détention.

Contacté, Juma Edouard, porte-parole du ministère de l’Education, indique qu’il n’y a qu’un seul mot d’ordre donné à tous les directeurs d’école par rapport à ce phénomène de gribouillage : « Les élèves reconnaissent eux-mêmes que ce qu’ils ont fait est répréhensible et c’est pourquoi ils doivent être sanctionnés. »

Par contre, soutient-il, aucun élève ne devrait être puni pour une infraction qu’il n’a pas commise. D’où la nécessité de mener des enquêtes minutieuses afin d’établir les responsabilités individuelles avant que les autorités scolaires ne prennent de décision. « L’important est que la sanction frappe les véritables coupables. »

A la question de savoir si ceux qui ont été emprisonnés pour la même infraction pourront être libérés pour qu’ils passent également leurs examens, Juma Edouard indique que ces cas ne relèvent plus de la compétence du ministère de l’Education. « Lorsqu’il s’agit d’une infraction ou d’une faute qui va au-delà de notre règlement scolaire et que la justice s’en saisit, nous n’avons plus la compétence d’intervenir. »

Forum des lecteurs d'Iwacu

15 réactions
  1. Kimaranyi

    C’est vraiment ridicule pour les gens qui élaborent les programmes des écoles cette photo porte malheur qu’est ce qu’elle venue faire dans les manuels scolaires ? Les enquêtes devraient se pencher également du côté du concepteur du programme car il a mis le président pour qu’il soit étudié comme l’histoire ! Peut-être que lui il croyait qu’en 2016 Nkurunziza allait faire object de l’histoire vécue au Burundi . Il avait raison non? Et puis qu’a t-il fait de spécial pour se retrouver dans un manuel scolaire ? Rwagasore , Ndadaye, Mwezi, Ntare Rugamba, ou même Ndizeye je comprendrait.

  2. Marie claire

    Les autorités scolaires devraient d’abord étudier la psychologie des enfants qui font ces gribouillages.
    Les enfants expriment leurs sentiments, au lieu de les punir , il faut les écouter et leur montrent le coté négatif de ces gribouillages .

  3. jean

    « Le même traitement s’est opéré lorsque le phénomène éclate fin mai avec la découverte de gribouillis sur des photos du président Pierre Nkurunziza dans des manuels scolaires dans la localité de Ruziba, en commune Kanyosha, au sud du pays. » C’est plutot Sud de la capitale, Bujumbura.

  4. Yves

    Le fait déjà qu’un président en exercice se retrouve dans un manuel scolaire en dit long sur l’indigence du programme scolaire du pays en question. Quel grand chantier, quelle grande décision lui vaut une place dans un livre d’école ? De quel exploit peut-il donc bien se vanter ? Celui d’avoir précipité le Burundi à la dernière place de tous les classements mondiaux de développement ? C’est là que l’on réalise que son Altesse sérénissime n’est pas un simple incompétent, mais est également un grand mégalomane.

  5. kindros

    Voilà le sous-développement mental de chez dirigeants! Soyez sportif monsieur le Président, une foto c´et une foto, libérer ces enfants et remplacer ces ouvrages abimés!!

    • Bakari

      @kindros
      « Soyez sportif monsieur le Président, une foto c´et une foto, libérer ces enfants et remplacer ces ouvrages abimés!! »

      Ah non! Si on est d’accord que les enfants devraient être libérés, le minimum est qu’ils aient un peu de responsabilité relative à leurs actes. Donc qui casse paie comme nous disait notre directeur dans une autre vie!

      • Yves

        @Bakari : et la responsabilité des dirigeants pour le chaos qu’ils ont amené au Burundi, on en parle ?

        • Bakari

          Les dirigeants assument leurs actes.
          Ils vont sûrement en cueillir les fruits!

          • Yves

            Les fruits qui sont cueillis sont amers : économie en ruine, insécurité totale, torture et assassinats extrajudiciaires, Justice fantoche aux ordres. Voilà ce que vos ‘amis’ ont réussi à faire du Burundi : un champs de ruine

  6. mahano

    Ni bakure vuba bwango iyo foto y’amahano.

  7. Kabingo Dora

    La question est celle de savoir si ces élèves doivent être renvoyés de l’école ou pas .Mr Edouard Juma , porte parole du ministère de l’éducation ne veut pas y répondre visiblement . Il pense peut être que le détournement de l’argent publique est moins délictuel que les gribouillis. Je suis capable de balancer sur lui , je sais ce qu’il a fait dans ce domaine

  8. Tijos

    Abashingantahe baraheze muri iki gihugu cacu. Uyu mugabo Juma wumva avuze iki? Yaba abo bana bari abiwe yari kuvuga ngo batware muri prison? Ruriye abandi rutabibagiye!!!

    • roger crettol

      Le respect de l’autorité est un des piliers des sociétés humaines. Ce n’est pas le seul.

      Quand un chef de famille brûle l’argent du ménage au cabaret, peut-être bien que son frère ou son beau-frère, ou un de ses oncles, va intervenir. Le respect de l’autorité n’est pas un impératif absolu.

      Si la conduite du président avait été irréprochable aux yeux de tous, ces gribouillages ne seraient jamais apparus sur aucun livre.

      On punit les coupables que l’on peut.

      • nunu

         » ABAYOBOZI BARARYA ABANYENSHULE BAKISHURA « . nouveau proverbe?

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